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Recueil de nouvelle dans l'univers de la fille du cimetière
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tome 1, Chapitre 5 « Un parfum entêtant (partie 1) » tome 1, Chapitre 5

Dvan posa l'assiette sur la table et la fixa avec un sourire. Il plaça la cuillère à côté du pot de confiture. Comme tous les matins, le repas était prêt pour sa femme. Aussi étrange que cela puisse paraître, il aimait la regarder mordre avec délice dans la tranche de pain qu'il avait coupé pour elle. A croire que manger comme un humain lui manquait plus qu'il ne l'aurait cru.

Ici, la nourriture était présent tous les jours, sans être en abondance, elle permettait à Lynette de vivre correctement. L'ironie du sort, c'était que c'était quand il y en avait qu'il ne pouvait plus s'en repaître. Il repensa à la compote de pommes et aux fruits juteux qu'ils avaient coupés cette nuit-là.

Lynette poussa la porte, et s'installa à table sans un mot. Elle était pâle.

Dvan s'approcha et posa un baiser sur son front.

-Bon appétit, mon ange.

-Merci.

Elle prit sa main dans la sienne. Ce geste tendre lui fit fermer les yeux. Il l'embrassa tendrement sur le crâne. Elle sentait bon. Sa bouche descendit sur son cou. Ses lèvres effleurèrent sa peau douce, la faisant frissonner.

-Dvan ?

Sa voix le tira de ses pensées. Sans s'en rendre compte, ses crocs étaient sortis. Avait-il encore failli perdre le contrôle ? Après tout, elle sentait tellement bon.

-Je t'aime.

-Moi aussi.

Elle sourit tendrement, et il l'enlaça.

-On pourrait retourner s'allonger tous les deux ? Après tout, il n'y a personne d'autre que nous ici…

Sa femme secoua la tête.

-Je doute que se soit une bonne idée.

-Ha…

Il fut brusquement déçu.

-Ce soir ? lui murmura-t-il à l'oreille.

-Dvan !

Était-elle gênée par ses questions ? Peut-être se montrait-il trop pressant ?

-Pardon, mon amour. Je ne voulais pas t'embêter.

Le géant se leva.

-Ce n'est rien… C'est juste…

Lynette hésita.

-Je ferais mieux de prendre mon petit déjeuné.

Son mari la fixa, elle était penchée sur la table, et paraissait plus triste que d'habitude. Etait-ce à cause de ses paroles ?

-Veux-tu un peu d'eau ?

Il lui servit un verre et le posa devant elle. A nouveau, une délicieuse odeur lui chatouilla les narines. C'était agréable. De la salive se répandit dans sa bouche. Cette senteur, il la connaissait, elle lui était appréciable parce que c'était celle du sang.

Dvan recula. De loin, il observa sa femme en détail. Son corps voûté, son visage fatigué et le parfum qui s'échappait d'elle, il n'y avait aucun doute possible.

-Mon ange, tu es indisposée ?

Lynette laissa tomber sa tartine dans l'assiette, en entendant cette question.

-Que… Dvan ?

Il vint se placer à ses côtés.

-Ce n'est rien.

-Comment peux-tu le savoir ?

Elle baissa la tête, le visage en feu.

-C'est…

Mieux valait lui dire la vérité.

-C'est l'odeur.

-Je suis désolée.

Il prit sa main dans la sienne.

-Désolée de quoi ?

-Ca ne te choque pas ?

Dvan sourit.

-Pourquoi une chose pareille me choquerait ? Tu parles à un homme qui a grandit avec sa sœur. J'ai l'habitude.

Elle le fixa sans comprendre.

-A ce propos, si tu souffres trop, tu devrais aller t'allonger.

-Mais le cimetière…

-Tu es beaucoup plus importante.

Abandonnant son repas, Lynette le suivit.

-Tu ne termines pas ?

-Je n'ai pas envie, murmura-t-elle.

La jeune fille poussa la porte de la chambre et s'assit sur le lit. Aussitôt, Dvan se précipita pour l'aider à retirer ses bottines, et s'agenouilla devant elle.

-Dvan, je peux le faire.

Il secoua la tête.

-C'est déjà assez difficile pour toi, en ce moment.

La seconde chaussure rejoignit la seconde sur le sol.

-Tu devrais retirer ton corset, pour être mieux…

Ils échangèrent un regard, avant que Dvan se lève et lui tourne le dos.

-Je ne vois rien.

Par contre, son odorat lui fonctionnait bien. Elle sentait tellement bon, à nouveau, il sentit ses crocs sortirent sans qu'il n'est rien demandé.

-Lynette ?

-Je n'ai pas terminé, murmura-t-elle.

-Cette nuit, je vais devoir sortir.

-Ha ? D'accord.

Il perçut une pointe de tristesse dans sa voix, cela lui serra le coeur. Il aurait préféré rester avec elle, plutôt que de courir les rues à la recherche de nourriture. Seulement, Dvan ne se voyait pas résister longtemps à l'envie de sang, en percevant ses effluves partout.

Un bruissement d'étoffe lui apprit que la jeune fille avait soulevé les draps et s'était glissée en dessous.

-C'est bon, chuchota-t-elle.

Aussitôt, il se retourna, fit le tour du lit et vint s'allonger contre elle avec tendresse.

-Ca va ?

Elle eut un pâle sourire.

-Ne t'en fais pas. Ca ira vite mieux.

Il hocha la tête, avant de plonger son visage dans son cou, pour se gorger de son odeur. Sa langue caressa tendrement sa peau. C'était si bon. Il pouvait sentir la vie qui s'écouler dans ses veines. Il lui suffisait de mordre là, et il pourrait la faire couler dans sa bouche.

-Dvan ?

Il s'écarta à regret. Comment pouvait-il penser de telles choses ? C'était sa femme qui se tenait face à lui.

-Je… Excuse-moi, mon amour. C'est assez difficile pour moi de rester calme, dans cette situation.

Elle lui prit la main.

-Désolée.

-De quoi ? Si quelqu'un est désolé, ici, c'est moi. C'est horrible. Tu souffres et je ne pense qu'à m'empiffrer.

Lynette se retourna vers lui, pour prendre sa main dans la sienne.

-Ce n'est pas ta faute. Tu n'avais jamais vécu une telle situation.

Tendrement, il porta la main à sa bouche pour l'embrasser. Il rapprocha ensuite ses lèvres des siennes pour échanger un baiser intense. Leurs corps se collèrent et le géant fit glisser ses doigts sur le corps de la jeune fille, pour caresser ses bas, sous la couverture.

-Dvan, gémit-elle. Je doute que se soit le bon moment pour faire ce genre de chose.

Il se figea, penaud. Tout en lui, lui semblait pitoyable. Qu'essayait-il de faire ?

-Je…

Il se redressa.

-Désolé. Cette odeur me tourne la tête et je fais n'importe quoi.

Il se retourna pour la regarder.

-Si je n'étais pas dans cette période, j'aurais accepté.

-Je ne veux pas que tu acceptes juste pour me faire plaisir !

Elle secoua la tête.

-Non, je ne veux pas le faire juste pour toi. Je… Enfin, moi aussi…

Baissant les yeux, elle s'empourpra.

Sa femme était tellement magnifique. Il avait envie d'elle. Tellement envie… Planter ses crocs dans son cou…

Le géant secoua la tête.

-Je ferais mieux de te laisser te reposer. Je vais trouver quelque chose de chaud pour que tu le mettre contre ton ventre. Ca te soulagera sûrement.

-Mais ce n'est pas grave si…

-Je vais le faire ! déclara-t-il d'un air convaincu.

Sa détermination faisait plaisir à voir et un sourire se dessina sur le visage de Lynette.

-Merci.

Il se leva et quitta le lit, avant de se planter devant elle.

-Pourquoi ?

-D'être aussi gentil avec moi.

-C'est normal. Tu es ma femme et je prendrais toujours soin de toi.

Il hésita.

-Je risque de devoir sortir me nourrir tous les soirs dans cette situation.

-Je comprends. Dans cinq jours, ça sera passé.

Il déglutit difficilement. Cinq jours… Les cinq jours les plus longs de sa vie à m'en point douter.

Dvan quitta la pièce, avant d'y repointer le bout de son nez, à peine une minute après être sorti.

-Est-ce que tu utilises des pierres ?

-Des pierres ?!

Lynette fronça les sourcils.

-Oui. Heu… Rosa avait des pierres plates qu'elle faisait chauffer avant de les emballer dans un torchon pour les mettre sur son ventre. Cela lui faisait du bien.

La jeune fille secoua la tête.

-Je n'ai pas ce genre de choses…

-Ha ? Bon, je vais sortir pour en chercher.

-Dvan ! Hurla-t-elle, paniquée. Il fait jour !

-Ha oui… Bon bah, ce soir alors…

Il revint remonter la couverture sur elle.

-Repose-toi bien, mon amour.

-Je crois que je vais lire un peu.

Avant qu'elle ne puisse se lever, Dvan lui tendit un roman.

-C'est celui-ci que tu lis en ce moment ?

-Oui. Merci.

Elle fit un mouvement pour se redresser, et l'odeur se diffusa plus fortement dans la pièce, forçant le géant à la quitter au plus vite. Il s’installa à table songeur, avant de se saisir de la tartine pour la mettre sous son nez, ainsi, il sentirait l'odeur de la confiture plutôt que celle du sang. Où allait-il trouver des pierres qui puissent correspondre ?Rosa lui avait dit que les siennes venaient d'une rivière d'après ce qu'on lui avait rapporté. Ici, il n'y avait qu'un fleuve et il était si sale qu'on n'avait aucune envie de l'approcher. De toute façon, Dvan ne savait pas nager.

Il restait la solution la plus simple : faire le tour du cimetière en espérant tomber sur des cailloux de bonnes tailles. Peut-être mettrait-il la main dessus en creusant une tombe ? Après, il ne fallait pas qu'il soit trop lourd. Vu sa force, cela allait se révéler un casse-tête pour trouver la solution.

Qu'est-ce qui était chaud ? Le feu…

Son regard se tourna vers les flammes dans l'âtre. Avant de glisser sur la marmite, et la théière sur la table. Il posa la main à proximité. De la chaleur s'en dégageait. La prenant avec un torchon, il l'enroula dedans, pour ne pas se brûler et attendit pour vérifier la température. Heureux de voir que les choses se déroulaient comme prévues, il l'apporta à Lynette.

-Tiens pour mettre sur son ventre en attendant que je te trouve des pierres.

La jeune fille fronça les sourcils, surprise, avant de hausser les épaules et se saisir de ce qu'il lui tendait.

C'était bien le genre de son mari : trouver une solution à tout prix, même si l'idée pouvait paraître complètement stupide à la base. L'attention, elle restait bonne. Aussi, appliqua-t-elle le tout sur son ventre. La chaleur qui se diffusa sur sa peau l'aida. Cependant, cela n'était en rien pratique.

Elle sourit. C'était Dvan, et il était comme ça. Ce n'était pas le plus malin, mais c'était le plus gentil et le plus protecteur. Lynette n'en aurait voulu aucun autre. Chaque jour, il lui prouvait son attachement par ses gestes.

Le géant poussa la porte délicatement.

-Je t'ai préparé une tasse de tisane. Ca va te faire du bien. Enfin, je crois… J'en faisais à Rosa lorsqu'elle était dans cet état…

La tasse émit un petit son lorsqu'il la posa sur la table de nuit.

-Dvan ? Est-ce que tu es fatigué ?

-Ca ira. Ne t'en fais pas pour moi.

Ses mains se saisir d'une couverture pliée sur le tabouret.

-Au cas où je peux toujours dormir dans l'autre pièce.

-Mais le soleil ?

Effrayée, Lynette se redressa.

-Je ferais attention. Ne t'en fais pas pour moi.

Elle hésita, mais finit par hocher la tête. Ne sachant que faire pour l'aider, la jeune fille décida de rester la plus éloignée possible de lui.

Passant la porte, le géant déposa la couverture sur le sol et s'allongea dessus. S'il dormait, il aurait au moins le soulagement de voir disparaître de son esprit ce qui l’obsédait. Ses yeux se fermèrent, il était plus fatigué qu'il ne le pensait. Cependant, les odeurs le tourmentaient et il ne fit que tourner et se retourner dans tous les sens.

Énervé, il se leva, replia la couverture avant de la poser sur le banc. Prenant le balai, il se mit à tournoyer dans la pièce, dans tous les endroits où le soleil ne pouvait l'atteindre. Une fois sa tâche accomplie, Dvan se saisit de la serpillière qu'il trempa dans l'eau savonneuse. Cela aurait au moins le mérite de l'occuper un moment.

-Dvan ? Mais qu'est-ce que tu fais ? lui demanda sa femme en l'entendant s'agitait.

-Rien, je nettoie la maison.

Elle se prit à espérer qu'il ne remuerait pas toute l'habitation, ainsi, pendant cinq jours. Sinon, Lynette allait trouver le temps long.

Quand le soir finit par venir, ils en furent tous deux soulagés. Lui parce qu'il allait pouvoir sortir se nourrir et elle, parce qu'enfin, elle serait au calme.

-Je vais voir si peut trouver quelque chose pour te soulager.

-Attends, Dvan !

Elle lui tendit quelques pièces.

-Tu n'as pas d'argent, n'est-ce pas ?

Il secoua la tête. Recevoir de la monnaie de sa femme, le gênait toujours autant. C'était lui qui aurait dû prendre soin d'elle et non l'inverse. Seulement à moins de faire les poches des gens qu'il consommait, le géant n'en aurait sûrement jamais sous la main.

-Prend bien garde à toi.

Un sourit éclaira son visage en entendant ses mots, c'était plus fort que lui, mais il adorait quand Lynette s'inquiétait pour lui. Parfois, il croyait y revoir Rosa qui chaque matin, déposé un baiser sur sa joue pour lui donner du courage. En temps habituel, le géant se serait penché pour embrasser tendrement sa femme. Cependant mieux valait éviter pour le moment.

-A tout à l'heure.

Elle lui fit un petit signe de la main, avant qu'il ne disparaisse dans les ténèbres.


Texte publié par Nascana, 29 septembre 2019 à 00h38
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