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tome 1, Chapitre 3 tome 1, Chapitre 3

Lorsque le réveil de François sonna dans la pièce voisine, elle ouvrit les yeux et se demanda où elle était, et ce qu'elle faisait là. Finalement, elle se remémora la soirée de la veille. Avec un soupire, elle s'étira et sortie du lit. Étrangement, Déborah avait mieux dormit que prévu.

Peut-être était-ce dû au fait, qu'il n'y avait pas eu Romuald pour sursauter toute la nuit ? Au moindre mouvement, touchant son genou, son corps réagissait d'instinct et bouger comme pour éviter la douleur. Un geste pas des plus discrets pour la personne qui partageait le matelas avec lui.

Attrapant son pantalon, elle l’enfila en vitesse. Nul doute que le propriétaire de la chambre aurait sûrement envie de pouvoir y circuler librement.

Celui-ci frappa d'ailleurs délicatement au battant.

-Déborah, êtes-vous réveillée ?

-Oui.

Elle finissait de passer son t-shirt lorsqu'il poussa la porte. Heureusement, elle lui tournait le dos et il ne vit pas grand-chose.

-Veuillez m'excuser. J'aurais dû demander avant d'ouvrir…

La mage se retourna et lui sourit.

-C'est bon, je suis prête. J'aurais juste à passer dans la salle de bain, quelques minutes pour rafraîchir. D'ailleurs, à ce propos, auriez-vous un peigne ?

Il hocha la tête.

-J'ai laissé la trousse de toilette dans la salle de bain. Servez-vous dedans.

Il tourna les yeux et paru soudain anxieux. Déborah suivit son regard qui se posa sur son arme.

-Désolée. D'habitude, je ne la garde pas avec moi. N'allez pas me prendre pour une folle qui dort avec un pistolet.

-Non… Je n'ai jamais pensé ça… C'est juste que c'est la première fois que j'en vois une de si près. D'habitude, c'est plutôt dans les films…

La mage ne put s'empêcher de sourire face à cette déclaration.

-Je vous rassure, je vais la faire disparaître rapidement. Ca évitera de vous gêner.

-Ca ne me gêne pas. Vous ne faites rien de mal. Vous faites plutôt du bien.

Elle se prit à rire à cette phrase dit avec un tel naturel. Au moins, cet homme disait ce qu'il pensait, ça faisait plaisir à entendre, comparait aux grognements et aux monosyllabes de Romuald.

-Je suis désolée. Je commence à prendre beaucoup de place. Je vous empêche de dormir hier soir, j'occupe un lit de la chambre et vous vous retrouvez nez-à-nez avec mon arme au levé. Ca fait beaucoup pour un même matin. Si vous désirez me mettre à la porte et ne plus jamais me revoir, je comprendrais.

Il secoua vivement la tête.

-Bien sûr que je veux vous revoir. A moins que cela vous gêne ? Vous avez peut-être accepté l'offre sous l'impulsion du moment et….

-J'ai très envie de dîner avec vous ce soir.

L'espace d'un instant, ils se fixèrent en silence. Finalement, Déborah finit par prendre la parole :

-Ca vous embête si je passe dans la salle de bain ? Je n'en ai pas pour longtemps.

-Bien sûr. Allez-y, faites comme chez vous.

Déborah lui lança un doux sourire, avant d'entrer rapidement dans la pièce et se passa de l'eau fraîche sur le visage. Dommage qu'elle n'est pas de crème à disposition. Elle n'avait même pas son sac sur elle. Juste le strict minimum : ses papiers d'identité, un peu d'argent et son arme.

Jetant un coup d'oeil au miroir, elle vit qu'elle avait des cernes creusés. C'était ça, de faire une presque nuit blanche à son âge. Pour le reste, ça allait. La mage se saisit du peigne et se coiffa rapidement. Heureusement qu'elle avait coupé ses cheveux depuis peu, sinon cela lui aurait prit beaucoup plus de temps pour les démêler.

Après avoir vérifié son apparence générale, elle sortit. François l'attendait toujours dans l'entrée.

-C'est bon.

-Déjà ?

-J'avais dis que c'était rapide.

-Je devrais vous embaucher pour donner des leçons à ma femme.

Elle ne répondit rien. C'était vrai qu'il était marié. Sans savoir pourquoi cette pensée lui faisait mal au coeur, alors qu'au fond, elle ne désirait pas cet homme.

-Si vous voulez, il y a du café qui est en train de se préparer.

-Merci. Je vais vous en servir une tasse.

-Merci.

Ils voulurent tous les deux avancer dans une direction différente et restèrent coincer l'un par l'autre pendant quelques instants, ce qui leur valu un petit fou-rire. Bien sûr, ils retrouvèrent leur chemin rapidement. Déborah gagna la pièce principale et François la salle de bain.

Elle éteignit la cafetière qui continuer de souffler dans le vide et servit deux belles tasses de café brûlant, avant de les poser sur la table. Un ballotin contenant des nougats s'y trouvait. Elle le prit en main, et lu ce qui était marqué derrière.

-Vous pouvez en prendre si vous voulez.

Elle se retourna pour faire face à François rasé de près, et vêtu d'un costume. Il était plus séduisant qu'elle ne l'aurait cru, habillé ainsi. A côté de lui, elle devait vraiment faire tâche avec son jean noir et son perfecto bordeaux.

-On pourrait croire que je suis venue ici, dans le seul but de voler toutes vos provisions…

-Si c'est le cas, je n'y verrais aucun inconvénient.

Elle lui désigna la tasse qui lui faisait face.

-Je vous ai servi un café.

-Je vous remercie.

Il regarda sa montre.

-Et si une fois, le café terminé, je vous emmenez prendre un petit-déjeuné quelque part ?

-Au restaurant de l'hôtel ?

-Ca dépends, si vous connaissez d'autres adresses ?

Déborah lui sourit.

-Disons que je connais un petit salon de thé, pas trop lui de mon travail...

-Alors, allons-y.

Il lui rendit sourire alors qu'il trempait les lèvres dans sa tasse.

-Évidement, je vous invite.

La mage en resta bouche bée.

-Ca serait plutôt à moi, de vous inviter, après vous avoir tant dérangé.

-C'est une excellente idée. Je vous invite ce matin et vous m'inviterez en retour, un autre jour.

Elle secoua la tête.

-C'est un peu de la triche. Jusqu'à quand restez-vous ?

-Vendredi soir.

Déborah parut réfléchir l'espace d'un instant, avant de décréter :

-Très bien, alors, je vous inviterais mercredi.

-A la plage ?

Elle retint son souffle. Etait-il en train de lui demander de l'accompagner ? C'était un peu osé.

-Nous verrons cela, murmura-t-elle, avant de reporter son attention sur sa tasse.

En même temps, elle ne savait pas ce qu'elle faisait mercredi. Peut-être pourrait-elle s'arranger pour avoir son après-midi, puisqu'elle s'était retrouvée à poireauté la veille. En même temps, ils n'avaient pas eu à attendre longtemps. C'était déjà ça.

A nouveau, Déborah plongea les lèvres dans sa tasse et se rendit compte qu'elle avait terminé son café sans s'en rendre compte. Comment avoir l'air d'une idiote ? Mais son interlocuteur ne remarqua rien, ou alors il ne le montra pas.

-J'ai terminé, déclara-t-elle en reposant le récipient sur la table.

-Très bien. Je prends mes affaires et je vous suis.

C'était tellement étrange comme situation. Elle était avec un homme rencontré la veille, mais pourtant, elle avait l'impression de le connaître depuis longtemps.

Avisa le ruban qui fermait le sachet de nougat, Déborah lui demanda si elle pouvait l'utiliser.

-J'avoue ne pas en avoir grand usage.

-Tant mieux.

Tout en souriant, elle tressa rapidement sa chevelure et noua le lacet au bout. Lorsqu'elle eut terminé, la mage prit conscience du regard qui pesait sur elle.

-Désolée, je fais un peu du recyclage.

Nul doute qu'il devait avoir l'habitude de femme beaucoup plus classe, qui ne s'attachait pas les cheveux avec n'importe et passait dix ans à faire un brushing. Ce n'était pas son cas.

Brusquement, elle se sentit toute petite et prise en faute.

-C'est très original, souffla-t-il. Je n'aurais jamais pensé à faire ça. On voit mieux votre visage ainsi.

Elle détourna le regard. Elle ne s'était pas attendue à ça. Il semblait sincèrement l'admirait d'avoir utilisé un ruban d'emballage pour nouer ses cheveux. Pour la mage qui pensait recevoir du mépris, c'était inespéré.

Le voyant saisir une sacoche en cuir, elle gagna l'entrée. Après un dernier regard, pour vérifier qu'elle n'avait rien oublié, la mage ouvrit la porte.

-Si quelque chose reste ici, vous pourrez le récupérer ce soir, lui glissa François.

Il avait raison, mais elle vérifia quand même dans les poches de son blouson qu'elle avait sa pièce d'identité et un moyen de payement. Inviter les gens, sans pouvoir payer, ce n'était pas la meilleure des idées.

Ils descendirent les escaliers en silence, après avoir fermé à clé la chambre.

-Je vous offre les boissons, vous payez les gâteaux, déclara soudain Déborah.

Il lui sourit.

-Quand vous avez une idée dans la tête, vous lâchez jamais.

-Il faut savoir se montrer tenace, dans mon métier, si l'on veut avancer.

-Très bien. Je vous laisse faire. Sinon j'ai trop peur que vous arrêtiez…

-Et pour quel motif ?

-Refus d'obtempérer.

Ils se mirent à rire, ensemble, et débouchèrent dans le hall. Alors que François allait confier sa clé à la réception. Pendant ce temps-là, Déborah contempla l'endroit. Derrière le bar installé dans un coin, un employé s'appliquait à nettoyer des verres et des tasses alors que deux hommes lisaient des journaux sur les fauteuils mis à leur disposition.

Ici, tout semblait normal. Difficile de se dire que la veille, un type s'amusait à se rendre invisible pour voler, et semer le trouble dans les lieux. La vie avait déjà repris son cours.

François revint vers elle.

-C'est bon, nous pouvons y aller.

Elle hocha la tête, et le suivit, même si elle fut assez surprise lorsqu'il lui offrit son bras. Elle n'avait vraiment pas l'habitude de ça. Mais il fallait avouer que cela avait son charme. C'était déroutant, mais cet homme l'intriguait de plus en plus.

François l'amena jusqu'à une berline gris pâle, garé sur le parking arrière, celui proche du jardin. Cela expliquait au moins, pourquoi il était passé par là, la veille.

Elle fut étonnée de le voir ouvrir la portière du côté passager, pour la laisser y monter. On ne l'avait encore jamais traité ainsi, elle n'avait pas l'habitude. Déborah savait se débrouiller seule, pour tout. Comme son père était décédée alors qu'elle était enfant, elle avait grandi en aidant sa mère, que se soit à porter les courses ou à faire des travaux. Elle ne regrettait rien, mais parfois alors qu'elle portait des sacs plein à craquer, et qu'elle voyait des hommes aider leur compagne qui avait une baguette de pain dans les mains, elle ne pouvait s'empêcher de se sentir en décalage.

Après, il était vrai que Romuald en temps normal, ne l'aurait jamais laissé gérer ça, toute seule. Seulement, avec ses béquilles, il n'était pas d'une grande aide. C'était elle le soutient.

Partie comme elle l'était, Déborah s'imaginait déjà, avoir un enfant, seule. Ca serait bien le comble. La boucle serait bouclée. La femme qui n'avait besoin de personne se retrouverait seule, et assurait seule. Cela dit, elle espérait désespérément que ce ne serait pas l'unique option qui lui resterait.

Là, en ce jour, la situation s'inversait : on lui ouvrait les portes, on l'invitait… Elle n'aurait jamais cru que cela serait possible pour quelqu'un comme elle. Avec le sourire, la mage monta dans la voiture. C'était agréable d'avoir quelqu'un qui prenait soin de vous, même si ce n'était que pour quelques minutes, et qu'il s'agissait d'une personne qu'elle ne reverrons sûrement jamais, une fois, la semaine terminée.

Il monta à son tour et mit le contact, pendant qu'elle attachait sa ceinture.

-A partir de là, je vous laisse me guider. Je ne connais absolument pas la ville.

Elle lui sourit et hocha la tête.

-C'est assez simple, une fois qu'on est dans le centre-ville. On se garera au parking-souterrain. Il y a toujours de la place et la première heure est gratuite.

Il hocha la tête.

-Vous savez comment faire pour y aller ?

-Aucune idée.

Elle passa la main dans ses cheveux, en réfléchissant à l'itinéraire le plus simple.

-Bien…

-J'ai une autre idée, déclara soudain François.

-Ha oui ?

Il hocha la tête et détacha sa ceinture de sécurité. Elle le laissa faire en retenant son souffle. Peut-être avait-il changé d'avis et ne voulait-il pas être vu avec elle ? La mage était si banal, contrairement à lui, dans son costume chic. Ils n'étaient pas du tout assortie.

-Prenez le volant, ça ira sûrement plus vite.

-Vous voulez que je conduise votre voiture ?

-Cela vous pose un problème ?!

Elle secoua la tête.

-Non, mais l'assurance…

-Tant que je suis dans la voiture, je suis couvert.

-D'accord.

Déborah se détacha et ils échangèrent leurs places, l'un avec l'autre. Elle s'installa tranquillement.

-Pas contre, je vais être obligé de bouger le siège. J'ai peut-être des grandes jambes, mais là, je ne touche pas les pédales.

-Faite. Je le reculerais après.

Elle acquiesça. C'était tellement étrange qu'il accepte ainsi de lui confier ainsi le volant. Ca n'avait pas l'air de le gêner.

Jetant un coup d'oeil dans le rétroviseur, elle fit reculer la voiture et quitta le parking. Dans sa tête, elle avait déjà tracé l'itinéraire pour gagner le centre-ville. Heureusement, il n'y avait pas encore trop de circulation à cette heure de la matinée. Ils filèrent tranquillement, et Déborah en profita pour présenter les différents bâtiments qui ponctuaient le bord de la route. François l'écoutait, posant parfois des questions pour obtenir des précisions.

-Il y a beaucoup de plus de choses dans cette ville que je ne l'aurais cru.

-Vous imaginiez ça, comme une petite ville côtière ?

-Disons que je l'imaginais plus touristique.

-D'autres villes sont plus proches de la mer, elles nous volent la vedette. Mais en attendant, la vie est agréable ici.

Il fixa à nouveau la route.

-Vous avez grandit ici ?

-Dans un petit village à une dizaine de kilomètre d'ici. J'y ai vécu jusqu'à mes sept ans, ensuite nous sommes venus ici. La maison était plus petite, mais elle restait agréable. Ma tante vivait avec nous. Elle faisait ses études ici.

-Ha oui ? Qu'avait-elle choisi ?

Difficile de répondre, puisque comme elle, sa parente était environnementaliste et désirait devenir enseignante. Déborah ne pouvait pas dire qu'elle voulait être prof de magie. Mieux valait feinter en déformant un peu la réalité.

-Elle faisait des études dans le domaine de l'éducation.

-Pour travailler avec des enfants ou des adolescents ?

-Des adolescents.

Elle apprenait aux mages à se servir de leurs pouvoirs selon leurs capacités, car tous n'étaient pas égaux face à la magie. Déborah avait la chance une réserve de magie assez conséquente et un corps qui se rechargeait facilement.

Après tous les adolescents ou jeune adulte, devaient savoir maîtriser leurs pouvoirs même s'ils ne s'en servaient pas. Certains y dévouer leur vie, d'autres s'en détournaient, et les derniers qui enfreignaient la loi devait être puni. Selon ce qu'ils avaient fait, on pouvait soit brider leur pouvoir, soit en les en privant totalement.

-Et vous-même, pourquoi être devenu policière ?

-Je ne sais pas. L'envie d'aider les autres.

Surtout l'envie d'utiliser ses pouvoirs pour faire quelque chose de bien. Après tout, elle était plutôt douée en magie. Après avoir fait ses études, pendant trois années, elle avait enfin pu entrer dans la police. Au départ, elle n'était même pas sûr de rester. Finalement, ce travail lui plaisait.

C'était aussi là, qu'elle avait fait la connaissance de Romuald. La mage chassa cette pensée, ce n'était pas le moment. Il se rappellerait à elle, bien assez tôt.

-Et vous que faites-vous comme métier ?

Il hésita, ce qui la surprit.

-C'est bien moins passionnant que vous…

-Ce n'est pas grave.

-Je suis ingénieur spécialisé dans le domaine énergétique. Je m'occupe des parcs éolien.

-Ha ?

Déborah devait avouer qu'elle s'attendait à tout sauf à ça. En même temps, qui aurait pensé à ce métier en particulier.

-C'est intéressant.

-Ho, pas besoin de vous forcer, je sais très bien que ça n'intéresse pas grand monde.

-Mais vous, est-ce que ça vous plaît ?

Il paru décontenancer par la question.

-Je n'ai pas à me plaindre.

-Alors, c'est l'essentiel.

Arrivée à proximité du centre-ville, Déborah fut contrainte d'arrêter la voiture et d'attendre. Des travaux avaient lieu sur la chaussée, forçant les véhicules à partager la même voie. Elle soupira, en comptant mentalement les automobiles devant elle. Avec un peu de chance, ils pourraient traverser dès que le feu le leur permettrait.

-Qu'est-ce qui se passe ? l'interrogea François.

-C'est rien. Ils sont en train de passer certaines rues en piétonnes, mais du coup, il faut adapter les autres pour la circulation.

Elle marqua une petite pause avant de reprendre.

-Je pourrais sûrement m'y promener avec mon enfant, lorsque se sera terminé…

-Vous avez un enfant ?

-Non, justement. C'est simplement pour indiquer que les travaux vont sûrement s’inscrire dans la durée. Enfin, il n'y a plus qu'à espérer que les travaux seront à la hauteur.

Elle redémarra la voiture et s'engagea dans les petites rues, pour gagner le parking-souterrain du supermarché. Après avoir récupéré un ticket, ils purent se garer et quitter le véhicule.

-C'est intéressant d'avoir un parking aussi grand, dans le coin.

-Oui. Les gens qui travaillent ici, apprécient l'attention.

Déborah tendit ses clés à François. Elle préférait les rendre à son propriétaire plutôt que de les garder, non parce qu'elle craignait de les perdre, mais plutôt parce que la voiture semblait presque neuve, et qu'elle ne voulait pas avoir l'air d'être trop possessive avec des affaires qui ne lui appartenaient pas.

Il la remercia et lui emboîta le pas. Ensemble, ils remontèrent à la surface et gagnèrent la galerie marchande. La mage la traversa à bonne allure et les portes s'ouvrirent sur un bâtiment ancien, avec une façade bordée de colonnes. Un escalier y menait, encadré de deux griffons menaçant. François parut surprit. Il était vrai que le contraste entre les deux environnements différents étaient saisissant.

-La mairie, annonça la jeune femme. Les créatures mythologiques sont les gardiennes de la ville. Elles sont aussi visibles sur son blason. Une légende raconte qu'autrefois, elles semaient la terreur dans la région et qu'un homme trouva un moyen de les dompter. Depuis, elles dorment sous forme de statue.

Elle marqua un temps d'arrêt.

-Désolée, je vous embête avec mes histoires.

-Non, pas du tout. J’apprécie beaucoup ces petites informations supplémentaires.

La mage lui sourit.

-J'ai été guide touristique pendant l'été, trois ans de suite. Je vous ferais une visite privée si cela vous intéresse. Nous n'aurons qu'à refaire le parcours.

-Avec plaisir.

Déborah se rendit compte seulement à cet instant de ce qu'elle venait de dire. Après avoir dormi dans la même chambre d'hôtel, accepté de dîner avec lui, le soir même, et presque donné son accord pour une ballade à la plage ; elle se proposait pour une promenade dans les vieilles ruelles. Pourquoi faisait-elle tout ça ? Pour se changer les idées ou parce que c'était lui ?

Elle lui fit traverser les petites ruelles bordaient de maison à pan de bois, qui paraissait vouloir s'écrouler les unes sur les autres et pourtant tenaient bon. Ils débouchèrent sur une rue plus large où un pont de pierre enjambé une rivière.

-Je ne savais pas qu'il y avait un point d'eau par ici, avoua François.

Sa compagne lui fit signe d'approcher. Elle lui désigna une statuette qui reposait sur le côté d'une maison, ou plutôt qu'un restaurant.

-Un protecteur. On plaçait ces statues à proximité des ponts pour protéger les voyageurs du diable.

-Je ne l'aurais jamais remarqué sans vous.

-Il y a plein de choses cachés ici, lui révéla-t-elle.

Ils reprirent leur chemin et après quelques pas, Déborah poussa la porte d'une petite maisonnette peinte en bleu pâle, et invita son interlocuteur à la suivre.

Une jeune fille souriante les accueillit et leur proposa une place dans un coin du salon de thé. En quelques minutes, ils étaient installés et consultaient la carte, en silence.

-Le choix est assez vaste, déclara François. Que me conseillez-vous ?

Elle se pencha vers lui.

-Tout dépends ce que vous aimez… Plutôt fruit ou chocolat ?

-Fruit, sans le moindre doute.

-Alors, le cake citron et graines de pavot est un délice. Après, le fondant framboise et amande est aussi très bon.

Il parut hésiter.

-Si vous voulez, nous pouvons partager comme hier ?

-Ca...Ca ne vous dérange pas ?

Elle secoua la tête.

-Sinon je ne l'aurais pas proposé.

François baissa les yeux sur la carte, elle avait l'impression qu'il était un peu gêné.

-Prenons les deux que vous avez proposé, alors.

-D'accord. Et que boirez-vous ?

Il lui retourna la question.

-Un thé fumé.

-Qu'est-ce que c'est ?

-C'est comme un thé noir, mais qui a été fumé. Je vous laisserais goûter dans ma tasse si vous voulez.

-Euh… Je ne me permettrais jamais de boire dans votre tasse.

-Alors utiliser la cuillère.

Il se mit soudain à sourire.

-Je n'avais pas pensé à cela.

Ils rirent tous les deux.

-Je me contenterais d'un simple thé au citron.

Une fois leur commande prise, ils contemplèrent le décor volontairement ancien du salon de thé. Malgré le peu de places disponibles, la boutique semblait tourner correctement.

-On peut acheter du thé, et des gâteaux ici. Enfin, dans le cas des gâteaux, il faut les commander d'avance.

Dire qu'elle en avait acheté un ici même pour l'anniversaire de Romuald. Elle l'aurait bien fait elle-même, mais craignait de manquer de temps. Finalement, il en avait eu deux pour le prix d'un. Ce qui n'était pas un problème pour un fan de chocolat comme lui.

-S'ils font de la tisane apaisante, je devrais sûrement en acheter pour ma femme, déclara François, qui lisait toujours le menu.

-Elle est stressée ?

-Non, stressante. Elle est toujours énervée pour tout. Cela donne des choses assez étrange parfois.

-Comment ça ?

-Disons que des fois, vous voulez prendre votre petit-déjeuné le matin, tranquillement. Elle arrive, soulève votre tasse de café et la repose cinq centimètres plus loin, repousse votre assiette et s'en va sans un mot.

-Euh… Mais pourquoi fait-elle ça ?

Il haussa les épaules.

-Si seulement je le savais. Y a un moment où on arrête de chercher à comprendre.

Ils restèrent silencieux, quelques instants.

-J'aimerais ramener un cadeau à mon petit garçon, mais je ne sais pas quoi prendre. Du coup, il faudra bien que j'en prenne un, pour elle, sinon elle ne sera pas contente.

En entendant cela, Déborah se mit à rire.

-Je ne blague malheureusement pas. Mais ne parlons plus de ça.

-Puisqu'il est petit, pourquoi ne pas lui prendre une peluche ? Vous pourriez choisir un dauphin ou une autre créature marine.

-Cela pourrait en effet être une idée.

Ils s'interrompirent, le temps que la serveuse dépose devant eux les tasses et les gâteaux.

-Pourriez-vous faire deux comptes : un pour les boissons et un pour les desserts ?

-Bien sûr.

La jeune femme repartie.

-Vous n'abandonnez jamais ?

-Je tiens juste parole.

Disant cela, elle avança sa tasse vers lui pour qu'il puisse goûter son thé. Il hésita, mais fini par se saisir de sa cuillère et la plongea dedans.

-C'est inhabituel, mais pas mauvais.

Il lui rendit la tasse.

Pendant ce temps, elle avait entrepris de couper son gâteau à la framboise en deux parts distinctes et lui en donna un morceau. Il en fit de même.

Ils échangèrent un sourire, avant que François ne prenne la parole.

-Vous voulez goûter mon thé ?

-Pourquoi pas ? Je suis pique-assiette professionnelle. J'adore tout tester.

Ils rirent de bon coeur et elle plongea sa cuillère dans le liquide avant de la porter à sa bouche.

-On sent bien la petite pointe de citron.

Elle jeta un coup d'oeil à la montre de son compagnon, et s’aperçut du temps qui passait.

-Nous ferions bien de nous dépêcher sinon nous allons être en retard.

Il suivit son regard et poussa un soupire.

-Toute les bonnes choses ont une fin…

Ils terminèrent rapidement leur repas et se levèrent pour aller payer. Leur retour vers la voiture se fit d'un pas plus rapide, et ils échangèrent que peu de parole comme s'ils regrettaient de devoir se quitter ainsi. Pourtant, ce n'était qu'un au revoir et non un adieu.

Une fois devant le véhicule, François lui tendit de nouveau les clés. C'était toujours aussi surprenant. Cependant, elle ne fit aucun commentaire et les accepta de bon coeur.

-Je m'emmène au travail et je vous explique où vous devez aller. Avez-vous un plan de la ville ?

-Euh… Juste du centre-ville.

Il tira un papier de la boite à gant et le lui tendit.

-Ca devrait être suffisant. Je travaille là, indiqua-t-elle. Je vais réfléchir au meilleur itinéraire et je vous explique ça, rapidement.

En disant cela, elle mit le contact et activa la marche arrière. Quitter le centre-ville fut plus aisé que d'y entrer puisqu'elle évita la zone de travaux. En quelques minutes, elle se gara devant un grand bâtiment austère.

-Ce n'est pas marqué « hôtel de police » dessus ? demanda François.

Il avait raison. Cependant, elle ne pouvait lui dire que c'était parce qu'elle faisait partie de la police magique.

-Nous sommes un département spécial.

-Spécial en quoi ?

-Je vous en parlerez plus tard. Pour le moment, je vais vous expliquer comment vous rendre sur votre lieu de formation.

Il l'écouta attentivement, avant de hocher la tête, pour montrer qu'il avait bien compris. Ils descendirent de voiture, pour échanger leur place et Déborah se prit à souhaiter que personne ne les est vu faire. Même si elle n'avait rien à se reprocher, elle connaissait la puissance de la rumeur.

Au moins, en agissant normalement, et au vu de tout le monde, elle rendait la chose la plus normal possible. Tant qu'elle n'entendait pas de hurlement, c'était que Romuald ne l'avait pas vu faire. Sinon, il aurait rappliqué pour faire comprendre son mécontentement.

-A ce soir. Je ramènerais mes romans.

Il la regarda avec un grand sourire.

-A ce soir, Déborah.

La façon simple dont il prononça son prénom la fit frissonner. Il y avait quelque chose de particulier dans sa voix. Une attention pour elle, qui faisait battre son coeur.

Comme si c'était le moment de penser à ça, et avec lui. Il était marié. Ce n'était même pas la peine d'y croire, ou d'attendre quoi que se soit.

Elle se contenta donc de lui faire un petit signe de la main, avant de tourner les talons. Cela ne servait rien, de retourner les choses dans tous les sens. Elles étaient ce qu'elles étaient. Cet homme ne voulait que son amitié. Si elle était logique, c'était aussi ce qu'elle aurait dû vouloir.

Il fallait déjà qu'elle résolve le problème Romuald, avant de penser à autre chose. Nul doute qu'il n'allait pas apprécié qu'elle l'est abandonnée, la veille. Ca allait être dur, mais elle devait mettre fin à tout cela, et le plus tôt serait le mieux.


Texte publié par Nascana, 21 avril 2019 à 19h35
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