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tome 1, Chapitre 30 « A la recherche du sac oublié... » tome 1, Chapitre 30

-Est-ce que ça va ?

Lynette ne put s'empêcher de se demander s'il voulait prendre des nouvelles de sa santé ou s'il lui demandé son avis pour la stèle. Elle choisit la deuxième solution et se pencha sur la pierre, qu'elle examina.

-Pour une première, c'est très bien.

-Merci, mais ce n'était pas ce que je voulais dire…

Finalement, c'était la première option.

-Désolée, d'avoir répondu de manière agressive. Je suis un peu…

-C'est normal. Encore plus quand on sait ce qui s'est passé hier.

Lui-même n'en avait qu'une idée partiel, puisqu'il ne l'avait pas vécu. Mais pour elle… Venir lui parler de mariage, c'était de l'indécence. Il ne valait mieux pas mieux, puisqu'il s'était permis de donner son avis. Enfin, non, en vérité, Dvan s'inquiétait de sa sécurité. Dommage qu'il manque de tact.

A son côté, elle prit une grande respiration.

-Allons-y ! On s'occupera du reste ensuite. De toute façon, ils ne vont pas s'échapper.

Le géant ramassa les outils.

-Je vais les ranger.

-D'accord, je vais fermer les portes à clé, on se retrouve devant la grille.

Il hocha la tête. Il devait trouver quelque chose à dire, pour l'apaiser. Ses paroles lui revinrent en mémoire « épousez-moi que je sois enfin tranquille ». Il avait été à deux doigts de répondre « d'accord », avant de comprendre qu'elle avait dit ça soit le coup de l'énervement. Dvan se passa la main sur le front, il aurait eu l'air malin.

La jeune fille arriva vers lui, et tourna la tête vers la maison.

-C'est bon, tout est fermé. Seulement, je déteste laisser le cimetière seul. Enfin, je n'ai pas trop le choix…

Elle paraissait visiblement anxieuse et pas juste à l'idée de quitter les lieux.

-Je te protégerais, déclara-t-il brusquement, en espérant que cela la rassurait.

-Merci, Dvan.

Encore cette façon si particulière de dire son prénom. Dans sa bouche, c'est doux et plaisant.

Il lui tendit le bras, en n'espérant pas qu'elle accepte. Étrangement, elle glissa le sien sans un mot et sa main minuscule vint se poser sur son poignet, avec un sourire.

-Avec vous, je me sens en sécurité.

La sécurité était relative, ne put s'empêcher de penser le géant. Certes, il la protégerait des autres, mais serait bien obligé de lui fausser compagnie à un moment pour aller se nourrir. Mieux valait éviter de faire comme la veille. Dès l'instant où il commencerait à ressentir cette soif profonde, il lui faudrait trouver du sang. Sinon, c'était elle qui en pâtirait.

Elle poussa la grille qui produisit à nouveau un horrible grincement, la ramenant à la réalité.

-J'avais oublié qu'il fallait huiler les gonds…

-Je m'en occuperais en rentrant, lui promit Dvan.

-Je peux le faire aussi, ça ne nécessite pas tant de force.

Il la regarda avec un sourire, mais ne dit rien.

-Qu'il y a-t-il ?

-Rien.

-Vous avez l'air amusé alors faites moi part de vos réflexions.

-C'est juste que je me demande comment tu réussiras à attendre les gonds d'en haut, avec ta taille.

Elle soupira.

-Je monterais sur un tabouret. J'ai l'habitude d'être toujours trop petite…

-Désolé, je ne voulais pas me moquer.

-A ce niveau-là, ce n'est pas de la moquerie, c'est une réalité. Je doute d'ailleurs de grandir encore, à mon âge.

Dvan n'osa pas lui demander son âge. Elle avait l'air d'une gamine, mais au vu de sa façon de parler, elle devait sûrement être plus vieille. Encore plus, lorsque les autres la pressaient pour des histoires de mariage.

-Vous voulez récupérer votre sac, avant ?

Heureusement, qu'elle était là pour lui rappeler sinon il serait sûrement reparti sans. Tout occupé qu'il était à fixer sa silhouette à son côté. Il n'avait jamais été aussi proche d'une femme, au point de marcher avec elle, comme ça dans la rue. Enfin, si l'on exceptait Rosa, mais elle ne se plaçait pas dans la même catégorie.

Pourquoi se sentait-il si fier et si heureux ? Juste parce qu'elle avait accepté d'être près de lui, sans en ressentir de la honte, comme c'était souvent le cas ? Les paroles de Joyar lui revinrent en mémoire. Il en avait l'habitude, mais ce n'était pas pour ça, que cela ne le blessait pas. Seulement ce coup-ci, Lynette l'avait défendu. Est-ce que c'était juste par esprit de contradiction ou alors était-elle sincère ?

-Où allons-nous ? lui demanda-t-elle, soudain.

-Euh… Je ne connais pas bien la ville. En plus, je ne suis pas passé par le chemin le plus praticable…

-Ou voulez-vous aller ?

Dvan se retourna et lui montra la falaise surplombant le cimetière.

-Comment fait-on pour retourner là-bas ?

-Je vous y emmène. Le quartier est assez pauvre, du coup, il vaudrait mieux se dépêcher avant qu'il ne soit trop tard.

Il y avait une pointe d'appréhension dans sa voix, mais elle ne se laissa pas démonter. Le géant lui aurait bien demandé de rester au cimetière à l'attendre, seulement il savait qu'avec elle pour le guider, il irait plus vite.

Il prit sa main dans la sienne et la serra doucement, avant de la lâcher.

-N'es pas peur, tout ira bien. Je suis près de toi.

-Je sais.

Elle lui sourit avec tendresse.

-Je n'ai pas peur.

Sans attendre plus longtemps, Lynette se mit en route, l’entraînant à travers les diverses ruelles. Il fut surpris par son allure et son pas déterminé. A nouveau, sa force transparaissait, mettant de côté son apparence de frêle jeune fille.

Rapidement, ils quittèrent les rues pavées pour celles en terre battue. Dvan reconnut sans mal, le faubourg qu'il avait visité la veille. Certes, la maison de Lynette n'avait rien de luxueux mais comparé aux caves humides et autres taudis construit de bric et de broc, la différence était nettement visible.

Il risqua un coup d'oeil à sa compagne. Elle restait impassible.

-Vous commencez à vous y retrouver ? lui demanda-t-elle soudain.

Il hocha la tête.

-Oui, heureusement que tu étais là. Tu m'as beaucoup aidé.

-Je n'ai pas franchement de mérite. Je suis née et j'ai grandi dans cette ville. Ma famille veille sur le cimetière depuis si longtemps qu'à l'époque, il était encore en dehors de la cité. Je vous montrerais le reste des remparts, si cela vous intéresse.

Dvan hocha la tête. C'était si inattendu. Elle lui proposait de sortir dans la rue à son côté, sans avoir honte. Autant là, il l'accompagnait, autant ce qu'elle lui soumettait, c'était de faire une balade avec lui.

-Tu…

Il hésita.

-Tu accepterais d'être vu avec moi ?

Il se rendit compte qu'il avait posé la question à voix haute et en ressentit une certaine gêne.

-Pardon ? Pourquoi je refuserais ?

-Euh…

Que devait-il répondre ? Cela paraissait être l'évidence même…

-A cause de mon visage…

Sa voix se brisa sur le dernier mot. C'était une chose de savoir et une autre, de le formuler à voix haute.

-On ne le voit même pas votre visage.

Comprenant combien Dvan pouvait être anxieux à cause de ses blessures. Elle prit délicatement sa main dans la sienne et ne la lâcha pas.

-Est-ce que vous n'accepteriez de sortir avec moi, malgré ma petite taille ?

Il la fixa sans la voir.

-Bien sûr, mais cela n'a pas vraiment de lien…

-J'accepterais d'aller n'importe où avec vous.

Face à cette déclaration, il détourna le visage, se sentant rougir. Pourquoi lui disait-elle des choses aussi gentilles ? Sans en avoir l'air, elle touchait son coeur, avec plus de force qu'il aurait pu le croire.

-C'est là, déclara-t-il brusquement, en montrant une sorte bâtisse décatie.

Il profita de la distraction pour s'avancer, mais la jeune fille le suivit en le tenant toujours tendrement par la main. Il se demanda de quoi ils pouvaient bien avoir l'air. Pourtant, à aucun moment, Dvan n'eut l'envie de quitter cette paume chaude et rassurante contre la sienne.

Ils s'approchèrent ensemble, si proche l'un de l'autre. L'endroit paraissait minuscule et devait vendre plus d'alcool que de nourriture. Le géant frappa au volet de bois et attendit. Une voix se mit à beugler, faisant comprendre que la personne arrivait.

Le battant s'ouvrit avec fracas, et un type entre deux-âge aux cheveux hirsutes les fixa. Son regard s'attarda sur Lynette, glissant rapidement sur son visage pour descendre sur son corps. Elle ne dit rien, mais Dvan sentit bien qu'elle s'en rendait compte. Lâchant sa main, il passa le bras autour de ses épaules, pour la protéger. La jeune fille se laissa faire et vint mettre se blottir contre lui, réchauffant son corps et son coeur par la même occasion.

-Ouais, c'est pour quoi ?

-Je viens rechercher mon sac, grogna Dvan.

-Ha ouais. T'es pas un peu en retard par hasard ?! T'as intérêt à payer pour deux jours !

-C'est bon, je vais te filer ton pognon donc me prends pas la tête et rends-moi mes affaires !

Le géant sortit les pièces de sa poche et lui en donna quelques uns.

-C'est pas assez !

-Mon sac et t'auras le reste !

L'autre marmonna dans sa barbe, avant de lui rendre son bien.

-De toute façon, y avait rien d'intéressant dedans !

-Tu croyais que j'y cachais quoi ? Les joyaux de la couronne.

Dvan lui balança son argent et s’apprêtait à tourner les talons lorsque l'autre le rappela.

-Hé, attends ! Elle est mignonne ta copine. C'est combien ?

Le géant serra les dents.

-C'est ma femme que tu insultes comme ça ?!

-Désolé, c'est pas marqué dessus.

Le type ferma son volet, en marmonnant suffisamment fort pour que Dvan entende :

-Sa femme… Il a payé combien pour l'avoir… J'en voudrais bien une petite comme ça, moi aussi.

Le géant serra les poings. Hésitant sur la conduite à tenir. Il avait bien envie de traîner l'homme, ici, pour qu'il s'excuse auprès de la jeune fille.

-Allons-y.

Lynette lui lança un regard tendre.

-Tu as raison, ne traînons pas.

A regret, il retira son bras des frêles épaules et lui tendit la main, elle la prit sans hésiter. Il n'y avait aucune peur, chez elle.

-Votre femme, hein ? murmura-t-elle, dans un sourire.

-Désolé, c'est la seule chose qui m'est venu à l'esprit pour qu'il lâche l'affaire. Je n'aimais pas le regard qu'il portait sur toi !

-Heureusement vous étiez là, comme ça, je n'avais pas peur.

Ils reprirent leur chemin en sens inverse.

Lynette n'osait lui dire que la réflexion lui avait fait plaisir. Pourquoi se sentait-elle attirée par lui ? Inconsciemment, elle porta la main à son cou.

-Ca fait encore mal ? lui demanda Dvan avec appréhension.

-Non, ce n'est pas ça.

Mieux valait changer de sujet, avant qu'il lui pose d'autres questions. Elle se sentait un peu honteuse de ses pensées. Elle avait réellement eu l'impression qu'il mettait toute sa tendresse alors qu'il l'avait juste mordu. Etait-ce un de ses pouvoirs ? En tout cas, il ne devait pas être au courant.

-Est-ce que ça fait longtemps que vous êtes…

Lynette s'interrompit. Le milieu de la rue n'était sûrement pas le meilleur endroit pour poser ce genre de question. Il comprit cependant très bien de quoi elle voulait parler.

-Pas vraiment…

Elle aurait voulu lui poser d'autres questions : savoir comment il était devenu ainsi ? Ce que ça faisait ? Comment il le vivait au quotidien…

Le paysage changea à nouveau. Ils étaient revenus à leur point de départ. A regret, elle sentit Dvan lâcher sa main. Il lui tendit à nouveau le bras.

-Ca sera peut-être mieux ainsi.

Même si elle savait qu'il avait raison, elle regretta la présence de sa paume contre la sienne, et se rapprocha doucement de lui.

-Ca ne me dérange pas qu'on me prenne pour votre femme, souffla-t-elle.

Le géant prit un peu de temps avant de répondre. En vérité, il ne savait pas quoi dire. Lynette n'arrêtait pas de lâcher des phrases étranges et s'il s'était écouté, il aurait pu croire qu'elle s'intéressait à lui. Alors qu'il n'en était sûrement rien. De toute façon, il n'était pas doué pour la subtilité. Mieux valait passer outre. Cela devait juste être une manière pour elle, de lui faire comprendre qu'il avait sa place et qu'elle ne lui avait pas offert de rester, simplement pour ne pas être seule.

Ils arrivèrent en vu de l’hôtel de police. Un grand bâtiment situé dans l'angle de deux rues, qui pouvait presque ressembler à une tour dominant la rue. Des fenêtres en perçaient la façade, encadrées de corniches.

-Je pense qu'il vaut mieux que l'on reste une patronne et son employé pour le moment, lui souffla Dvan.

Elle ne répondit pas. La jeune femme savait bien qu'il avait raison, et mit une petite distance entre leurs deux corps, non sans regret.


Texte publié par Nascana, 15 décembre 2019 à 13h42
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