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tome 1, Chapitre 18 tome 1, Chapitre 18

Nils rattrapa son frère qui traînait les pieds dans le couloir. Il eut envie de lui dire de s'activer, mais finalement, il se contenta de passer devant lui, sans un mot. Ca ne servait à rien de se disputer sans raison. En plus, il ne s'était pas excusé pour tout à l'heure, même s'il n'avait pas envie de le faire, il savait qu'il était en tord, ce qui lui donnait mauvaise conscience. L'effet Kamu sans doute.

-Désolé, lança-t-il comme ça, avant d'entrer dans la cuisine.

-C'est une façon subtile de dire que je suis au milieu de ton chemin ? lâcha Lucas en entrant à son tour dans la pièce.

Nils secoua la tête. Pour une fois, qu'il s'excusait vraiment, il n'était pas compris. En même temps, sa façon de faire était des plus étranges.

Son aîné balança les paquets de serviettes sur la table, et croisa les bras.

-Tu sais papa, l'année prochaine, prends des serviettes blanches pour tout le monde. Ca évitera beaucoup de problème.

François releva la tête.

-C'était pour l'esprit de Noël, expliqua son père.

-Prends des serviettes avec un sapin de Noël alors, je t'assure que ça évitera des problèmes, grogna son fils.

François le fixa, sans comprendre.

-Qu'est-ce qui ne va pas ?

L'autre secoua la tête.

-Rien, rien. Je suis fatigué, c'est tout.

-Tu dors bien, au moins, en ce moment ?

Lucas haussa les épaules, avant de prendre le plat des mains de son parent, devançant Nils. Il repartit avec, d'un air énervé, et pendant un instant, son frère cru qu'il allait tout mettre par terre. Mais finalement, le pire fut évité.

Son père le regarda partir, surpris.

-J'ai dis quelque chose de mal ?

Nils haussa les épaules.

-Il doit toujours être insomniaque. C'était le cas lorsqu'on était étudiant.

-Toujours ? Il n'en parle jamais. Est-ce qu'il a été voir un médecin ?

-J'en sais rien. C'est peut-être ça, qu'il voulait te dire.

-Tu crois ?

A nouveau, Nils haussa les épaules. Comment pouvait-il savoir quel était le problème de Lucas ?

-J'avoue que j'en sais rien. Essaye de voir avec lui.

Son père hocha la tête.

-Je vais voir si je peux l'attraper après le repas.

Nils acquiesça. C'était le mieux à faire.

-Il reste quoi à prendre ?

-La vinaigrette, et le saumon.

Son père lui donna le plat de poisson.

-Papa ? Tu crois qu'elles sont mangeables les verrines ?

-Je vais me dévouer pour goûter. Si je meurs, c'est que ce n'était pas comestible.

Nils ne put s'empêcher de sourire. Lui-même n'avait aucune envie de toucher aux verrines de sa belle-mère. Rien que l'idée qu'elle cuisine pour tenter d'impressionner son père, donnait envie de rire. Comme si elle pourrait rivaliser avec Déborah, un jour. Ca devait être difficile d'être en compétition avec un fantôme. Pour une fois, il la plaignait, d'autant plus qu'il savait qu'elle ne gagnerait jamais.

Ils quittèrent la pièce et gagnèrent la salle à manger. Le repas allait pouvoir commencer. A voir comment ça tournerait.

Nils déposa le plat sur la table et fixa les personnes assises. Ben évita son regard ce qui n'avait rien de surprenant. Maxime s'agitait sur son siège en racontant une anecdote, à laquelle Loli répondait d'un air enthousiaste. De l'autre côté de la table, c'était la soupe à la grimace. L'espace d'un instant, il eut de la peine pour son frère coincé entre sa femme qui fusillait la table du regard et sa mère qui pinçait les lèvres en fixant son père.

A milieu de tout ça, il y avait Kamu qui réussissait par on ne sait quel miracle à faire preuve de gaité, et être agréable. Il ne pu s'empêcher de fixer ses yeux sur lui, et se prit à sourire, en le regardant. La voix de son père le ramena à la réalité.

-Va donc t'asseoir, Nils.

Il se prit à espérer qu'il n'avait pas un air complètement stupide sur le visage.

Faisant le tour de la table, il profita de son passage derrière Loli, pour lui titiller les côtes, ce qui la fit sauter en l'air, en poussant un petit cri.

-Méchant !

Il ne pu s'empêcher de sourire en coin, et s'installa à côté de Kamu. A peine assit, celui-ci noua ses doigts aux siens, lui caressant tendrement la paume. C'était étrange comme ce simple geste lui apportait plus de réconfort que n'importe quelle parole.

Son père prit place au bout de la table, pour peu, on aurait pu s'attendre à ce qu'il fasse un discours.

-Je suis contente d'être avec ma famille, ce jour particulier. Je vous souhaite un bon appétit.

Tout le monde répondit en coeur.

-Goûtez mes verrines ! lui ordonna Anne-Laure.

Ce ne fit qu'effrayer encore plus Nils. Il attendit le signal de son père.

François plongea la cuillère dans le contenant, avant de la porter à sa bouche, et de se mettre à tousser. Voyant cela, le brun décida que la nourriture n'était pas comestible. Il fit un signe à Kamu, pour qu'il reste prudent.

-C'est quoi ça ?!

-Mes verrines !

Le couple s'affronta du regard l'espace de quelques instants.

-Tu cherches quoi ?! A tuer tout le monde ?! Ou alors juste moi. Tu cherches tant que ça, à hériter ma chérie ?

Elle haussa les épaules, avant de soupirer.

-Comme si c'était le cas… De toute façon, toi, tu n'es jamais content !

François fit tourner la cuillère dans la verrine et en sortie une sorte de grumeau transparent.

-C'est quoi ça ?! Du film plastique ?!

-Mais n'importe quoi, j'en ai pas utilisé.

Loli se pencha sur la masse.

-Je crois que c'est de la gélatine, papa.

-C'était marqué dans la recette qu'il fallait en mettre dans la mousse.

Son mari hocha la tête.

-Jusque là, c'est cohérent. Mais comment tu en es arrivé à ce résultat, précisément ?

Anne-Laure s'énerva.

-J'ai suivi la recette pourtant ! Ils ont dit de mettre de la gélatine, je l'ai mis !

François leva les yeux au ciel.

-Est-ce que tu l'as fait tremper dans l'eau froide avant ?

-C'était pas précisé dans la recette.

-Oui, sans doute parce que ce n'était pas issu de « recette de cuisine pour les Anne-Laure, n'ayant jamais mis un pied dans une cuisine ».

Elle resta bouche bée.

-Moi, j'avais bien dit que ça ne marchait pas comme ça, mais on m'écoute jamais, soupira Loli.

-Ho, toi, c'est bon. Pas la peine de jouer les expertes parce que ton père est là.

La jeune fille baissa la tête.

François se leva et ramassa les verrines.

-Bon. Pas besoin de s'empoisonner, passons directement aux entrées.

Sa femme secoua la tête.

-Non, je vais manger ce que j'ai préparé.

-Comme tu voudras. Je te souhaite bon courage.

Elle eut une moue boudeuse, et commença à manger sa préparation, en faisant semblant d'apprécier. Son mari la contempla en levant les yeux au ciel, avant de repartir avec le plat. Loli en profita pour servir tout le monde avec le saumon fumé, et Nils fit passer la salade autour de la table.

-Papa, je t'ai servi, déclara la jeune fille avec un sourire.

Le brun la contempla quelque peu surpris. Passé les premiers moments, elle était en train de redevenir agréable. Il se souvenait que trop bien de la gamine qui le suivait partout lors de son arrivée. Elle n'était pas méchante, juste très collante. Elle, elle voulait un nouveau grand-frère et lui, ne voulait pas de petit sœur. C'était en cela qu'il divergeait. Pourtant, elle avait réussi à être proche de lui, pendant un moment.

Sentant son regard sur elle, Loli se retourna.

-Quoi ? Tu veux encore m'embêter ?

Il se mit à sourire et sa sœur à bouder. A croire qu'elle craignait le pire, c'était attendrissant.

-Que faites-vous pour le nouvel an ? demanda brusquement Anne-Laure.

-On sera dans la famille d'Estella, répondit son fils.

-Ha…

Visiblement, elle n'était pas heureuse de l'apprendre.

-Et toi ? demanda-t-elle à Loli.

La jeune fille haussa les épaules.

-Comme j'habite ici, normalement, je suis là. A moins que papa me mette à la rue.

-Le jour de l'an de Loli, au milieu du jardin, ne put s'empêcher d'ajouter Lucas.

-T'es vraiment trop marrant.

Anne-Laure continua sur sa lancée.

-Toi, je ne te pose même pas la question, dit-elle en s'adressant à Nils.

-Pourquoi ? Pourquoi j'ai pas le droit à la question ?

-Tu vas encore trouver une excuse pour ne pas être là, et faire souffrir ton père.

Sur le coup, le brun resta bouche bée. Il ne s'attendait pas à une attaque si rapidement. Alors qu'il ouvrait la bouche pour répliquer, sa belle-mère continua.

-Tu vas sûrement aller dans sa famille à elle. S'ils le veulent bien et n'ont pas encore trop honte d'elle. Franchement pour supporter que sa fille s'habille ainsi, il faut vraiment beaucoup l'aimer.

Kamu se leva, brusquement. C'était comme si toute la tristesse accumulée depuis le début de la journée venait de ressurgir, matérialisé par un flot ininterrompu de larmes.

-Je n'ai plus de famille ! Mon père est mort ! s'écria-t-il. C'était quelqu'un de bien, il ne mérite pas qu'on médise sur son dos !

A nouveau, les pleurs dégoulinèrent sur son visage.

-Excusez-moi.

Sans attendre plus longtemps, il se sauva à toute allure. Sans leur laisser le temps de parler, et sans dire le moindre mot, Nils le suivit.

-K...Eva ! Attends-moi.

Il le rattrapa alors qu'il arrivait dans l'entrée. Au moins, il ne s'était pas servi de ses pouvoirs. L'attirant à lui, il le prit dans ses bras. L'autre se laissa faire, sans un mot. Blottissant son visage dans le cou de Nils, il ne bougea plus.

Il était sincèrement blessé. Le brun lui était sincèrement énervé. Mieux valait qu'il reste ici, pour le moment.

Son père sortit de la cuisine, les fixa comprendre, et s'approcha.

-Nils qu'est-ce que…

Il se rendit compte en cet instant que Kamu pleurait.

-Eva, est-ce que ça va ?

Pour seule réponse, il obtint un mouvement de tête.

Du regard, il interrogea Nils.

-Ta femme et sa bienveillance naturelle.

Il vit bien que son père n'approuvait pas, à son visage fermé.

-Emmène Eva se reposer à l'étage, quelques minutes, le temps qu'elle se sente mieux.

Nils acquiesça, et guida lentement Kamu, dans l'escalier. Une fois son père hors de vue, il souleva son collègue et le porta dans ses bras comme s'il ne pesait rien. L'autre se laissa faire, mais s'accrocha un peu plus fort à lui, comme s'il désirait que jamais rien ne les sépare.

***

Arrivée devant la porte, Kamu l'ouvrit tout en gardant son bras autour de la nuque de Nils. Tout était si étrange. Les événements s’enchaînaient à une vitesse folle et ses émotions ne suivaient pas. Elle n'était pas sûre de réussir à rester calme.

Le brun referma la porte d'un coup de pied, et elle se claqua seule. Il s'avança, et fit mine de poser Kamu sur le lit, mais celle-ci s'accrocha à lui, l'attirant vers elle.

-Kamu, lâche-moi.

Elle secoua la tête. Elle ne voulait pas se retrouver seule, même une seconde.

-On va finir par tomber tous les deux avec tes bêtises !

Il avait raison. Il fallait qu'elle se ressaisisse. A regret, la mage accepta de laisser Nils s'éloigner d'elle. Il allait sûrement repartir, et elle le comprenait bien. Pourtant, il s'assit près d'elle sur le lit, et entoura sa main, des siennes. Ce seul contact lui fit chaud au coeur.

Kamu se retint pour ne pas se relever brusquement pour l'embrasser encore et encore. Elle désirait plus que tout se gorger de sa chaleur, de son contact, de son odeur. Elle voulait complètement s'oublier au creux de ses bras, ne plus faire qu'un avec lui, pour ne plus penser à la personne pitoyable qu'elle était.

La mage passa la main sur ses joues pour essuyer ses larmes. Elle devait encore pleurer. C'était affreux, elle l'avait tellement fait qu'on aurait pu se dire que son corps allait se dessécher. Seulement, maintenant, elle se retrouvait face à un autre problème, elle ne gérait plus du tout sa tristesse.

Nils, sans un mot, l'attira dans ses bras. Il devait sans doute, la trouver pathétique. Comment pourrait-elle espérer lui plaire dans ces conditions alors qu'elle ne faisait que pleurnicher ?

-Je suis désolé, lui souffla-t-il.

Pourquoi ? C'était à elle de s'excuser.

Qui faisait n'importe quoi depuis son arrivée ? Au lieu de penser à sa mission et au pendentif, toutes ses pensées se tournaient vers son collègue. Elle était pire qu'une adolescente. Heureusement, elle n'avait pas encore réussi à faire fuir Nils. Cela viendrait peut-être à force de larmes et d'erreurs stupides.

-J'aurais dû dire quelque chose…

Il passa la main dans ses cheveux tendrement.

-Mon papa…

Pourquoi avait-elle commencé cette phrase ? En quoi en parler changerait les choses ?

-Mon papa est mort à cause de moi.

Nils secoua la tête.

-Ne pense pas à ça. En plus, je suis sûr que c'est même pas vrai…

Si pourtant… C'était la vérité. Si elle n'avait pas été là, à hurler qu'il était incapable de la comprendre alors peut-être, aurait-il pu entendre ce qui se passait autour de lui. Mais non, comme à son habitude, elle monopolisait la parole. Il n'y avait qu'elle qui avait le droit d'être malheureuse.

Et les dernières paroles qu'elle lui avait adressé « tu ne me comprends pas, et tu ne me comprendras jamais ». Mais elle avait tord. C'était elle qui n'avait rien compris. Elle pensait que ce qui venait de lui arriver était la fin du monde, seulement en réalité, celle-ci, était survenue quelques heures plus tard.

-Je lui ai dis des choses méchantes, et j'ai jamais pu m'excuser…

La mage resserra sa prise sur Nils.

-Il le savait.

-Comment ?

-Parce qu'il t'aimait.

Tout doucement, le brun la berça pour faire retomber toute la tension accumulée. Elle se laissa faire. C'était agréable. C'était la première fois depuis longtemps que quelqu'un s'occupait d'elle. En dehors de Loth, évidemment. Était-ce parce qu'il l'appréciait, ne serait-ce qu'un peu ?

Petit à petit, elle sentit son coeur se calmait, alors qu'elle se répétait mentalement, tout l'amour qu'elle avait pour son père. Il n'en saurait rien, mais elle gardait espoir que l'information finisse par lui arriver.

-Ca va mieux ? lui demanda Nils.

Elle hocha la tête. Ils étaient si proches. Elle aurait pu l'embrasser en quelques secondes, passait les mains sous sa chemise pour caresser son torse, et ensuite, laissait ses doigts s'aventuraient plus bas. Avec un peu de chance, il n'aurait pas été contre.

Mais c'était Nils, et elle préférait cent fois, être blotti dans ses bras, à s’emplir de sa chaleur, à goûter sa tendresse. C'était ça dont elle avait envie avant tout. Même si elle n'était pas une fille bien et qu'il ne voudrait sûrement jamais réellement d'elle, Kamu voulait encore y croire. Encore rêver de ces moments de douceur.

-Tu te sens de redescendre ?

Elle secoua la tête.

-Toi, vas-y, murmura-t-elle.

Ce n'était en rien ce qu'elle désirait, mais elle ne pouvait se permettre de le retenir, ici.

-Tant que tu ne vas pas bien, il vaut mieux que je sois là.

Elle ne put s'empêcher de sourire, face à cette déclaration. Kamu ne rêvait que d'une chose, qu'il reste avec elle.

-Pardon.

-C'est pas à toi de t'excuser, c'est à l'autre connasse. Je te jure qu'il n'y aurait pas de mission, je serais parti en claquant la porte !

-Tu m'aurais abandonnée ?

Nils soupira.

-Mais non, avec toi, bien évidemment. On serait parti fêter Noël, n'importe où, plutôt qu'ici. Même dans le coffre de ma voiture, s'il le fallait.

-On n'y serait un peu à l'étroit…

-C'était une image.

-Je sais.

Le brun soupira, et l'espace d'un instant, Kamu cru qu'elle en était la cause.

-Maman, tu aurais pu nous laisser des instructions claires et précises pour nous aider. A croire que tu as oublié…

-Oublié, répéta pensivement la mage.

Elle ferma les yeux. Elle était bien dans les bras de Nils.

-Est-ce que tu m'aimes, au moins, un peu ? lâcha-t-elle soudainement.

Il paru hésiter.

-Qu'est-ce que tu veux dire par là ?

-Est-ce que tu m'aimes au moins à 1% ?

-Euh… J'aime pas les gens en pourcentage. Mais ça me fait plaisir de me lever pour venir travailler avec toi.

Kamu se prit à sourire.

-Tous les matins ?

-Oui.

-Même ceux où tu es fatigué ?

-Même ceux-là.

Elle se recula pour le fixer dans les yeux.

-Nils, je…

Elle ne termina pas sa phrase, parce qu'il venait de poser ses lèvres sur les siennes. Quel meilleur moyen de la faire taire…

-T'es en train de me rendre dingue… Kamu comment tu fais ça ?

Elle se sentit rougir. On ne lui avait jamais fait une telle déclaration.

-Je…

Que répondre ? A part qu'elle était heureuse de le voir s'intéresser un peu à elle.

-Tu n'utilises pas de magie sur moi ?

Elle haussa les épaules.

-Tu en connais beaucoup des sorts pour rendre les gens amoureux de toi ?

Il rougit.

-Non, mais je suis pas amoureux, juste très attiré…

Ils se fixèrent pendant quelques instants sans un mot. Brusquement, Kamu se pencha vers lui, alors qu'au même moment, Nils baissait la tête vers sa montre pour vérifier l'heure. Du coup, elle embrassa sa joue, et recula en se sentant vaguement stupide.

-Déjà cette heure là ?! A croire qu'on aura pas terminé de manger avant minuit…

Il tentait comme il pouvait de détourner la conversation. Il devait clairement s'en vouloir de s'être laissé allé à lui donner un baiser.

-Tu vas redescendre, n'est-ce pas ?

Il soupira.

-C'est pas comme si, j'avais vraiment le choix…

Elle hocha la tête.

-Je comprends.

Même si elle mourait d'envie de le retenir, Kamu savait bien que ce n'était pas le moment.

-Ca ira pour toi ?

-Si tu m'embrasses, je survivrais.

-Kamu ! soupira-t-il.

-Quoi ? Ca valait le coup d'essayer...

C'était ridicule, mais lorsqu'elle était avec lui, elle se sentait bien. Elle n'avait plus envie de penser à tous ses gens qui lui manquaient, à tous ceux qui ne l'avaient pas comprise, à tous ceux qu'elle avait croisé pour se punir d'être elle-même, et d'être en vie.

-Nils ?

-Ouais ?

-Les cadeaux, on les échange à minuit ou demain matin ?

L'autre paru réfléchir.

-A la fin du repas. Pour les enfants, se sera demain, au réveil.

Elle hocha la tête. Il n'y avait plus qu'à espérer que son cadeau ferait plaisir à son ami. La mage avait mis tout son coeur pour le choisir.

Nils se dirigea vers son bureau, en tira une boite en bois, dans laquelle il farfouilla avant d'en tirer quelque chose. Elle ne vit pas de quoi il s'agissait, mais en se tournant vers elle, il avait un air grave sur le visage.

-Kamu…

Elle hocha la tête en attendant la suite.

-Mon cadeau risque sûrement de te surprendre. J'avoue que j'ai même peur qu'il ne te plaise pas. Après tout, ce n'est pas un cadeau neuf que j'ai acheté spécialement pour l'occasion.

Il parut hésiter.

-Tu sais, j'ai pas besoin de grand-chose. Tant que tu penses à moi, ça me fait plaisir.

Elle était sincère.

Il prit une grande respiration et attrapa sa main, y déposant quelque chose sans qu'elle puisse voir de quoi il s'agissait, et pour cause, il gardait ses doigts dessus pour le cacher.

-Je te le montre avant, comme ça, si ça ne va pas, je trouverais autre chose.

-Je suis sûr que ça sera un beau cadeau.

Nils retira sa paume, et la laissa contempler le bijou dans sa main. C'était une chaîne en argent, au bout de laquelle pendait une créature mi-chèvre et mi-poisson, dans le même métal. Elle fixa le tout, sans comprendre.

-C'est mon signe astrologique, murmura Kamu. Comment tu sais ?

-Parce que tu me l'as dit, pauvre nouille !

Elle hocha la tête avec un petit sourire.

-Ce collier, je l'ai acheté pour l'offrir à ma mère.

Cette révélation la surprit.

-Nils ? Enfin, tu ne peux pas me l'offrir. C'est trop… En plus, c'était à ta mère !

Il prit sa main dans la sienne et la referma sur le pendentif.

-Si ça ne te plaît pas, je t'en achèterais un autre.

Elle secoua la tête.

-Non, ce n'est pas ça. C'est magnifique et j'en suis très contente. Seulement, tu l'as acheté pour ta mère. Ca devait être tellement important pour toi, je peux pas te voler tes souvenirs.

-Accepte-le.

Avant qu'elle ne puisse parler, il leva la main en l'air pour l'arrêter.

-Écoute mes arguments ! Ce collier, je ne vais pas le porter et je ne connais personne qui le mérite autant que toi. Je suis sûr que ma mère voudrait que tu le gardes. Il n'est pas fait pour rester dans un tiroir, abandonné. Après, malgré sa mort, j'ai beaucoup de souvenirs de ma mère. Toi, tu n'en as pas de ton père, si je me trompe, alors ça sera un moyen pour toi de penser à lui, par association.

Au lieu d'obtenir une réponse orale, il se retrouva avec Kamu l'enlaçant, avec force.

-Est-ce que ça va ?

-Nils, murmura-t-elle. C'est si gentil.

Il haussa les épaules, plus gêné que fier de lui, après tout, il n'avait même pas pensé à cette histoire de cadeau, avant que Kamu lui en fasse la remarque.

-Alors ça te plaît vraiment ?

-Oui, énormément. C'est le plus beau cadeau qu'on m'est jamais fait !

Nils secoua la tête.

-J'en doute fort… Enfin, je suis content que ça te plaise.

Il reprit le bijou.

-Je te l'offrirais officiellement, tout à l'heure.

Kamu acquiesça.

-Ca me rendra autant heureuse que la première fois que tu me l'as montré.

Il lui sourit, avant de jeter un regard à sa montre.

-Bon, je vais redescendre. J'espère être suffisamment calme, pour ne pas m'énerver.

La mage prit sa main dans la sienne.

-Ca ira, j'ai confiance en toi.

Il porta ses doigts jusqu'à sa bouche et les embrassa. Ce geste tendre qui la transporta, elle sentit alors la chaleur embraser son corps. Pourtant, il n'avait pas fait grand-chose, mais ce simple geste la touchait plus qu'elle ne l'aurait cru possible.

Alors qu'il s'éloignait lentement, elle le rappela.

-Nils ? Est-ce que tu me montreras une photo, un jour ?

-Une photo de quoi ?

-De ta mère.

Il hocha la tête avec un sourire, et sortit son portefeuille de la poche de son pantalon. Il en tira une photo qu'il lui tendit. Dessus, on pouvait voir deux personnes assises à même le sol dans ce qui paraissait être un parc. L'homme enlaçait tendrement sa compagne qui souriait. Elle avait le visage tendre, et en relevant les yeux, pour les poser sur Nils, la mage ne put s'empêcher de voir les ressemblances entre eux. Ils ne pouvaient pas nier leur parenté.

-C'est ton père sur la photo ! Il n'a pas changé. Enfin si, mais il a toujours le même visage.

-Oui, c'est mes parents. Même si elle fait plus jeune, elle était plus âgée que lui, expliqua Nils.

-Elle était très belle. Tu lui ressembles tellement.

Il haussa les épaules et rangea la photo qu'elle venait de lui rendre.

-Bien plus qu'à ton père.

-On me le dit souvent… Sauf quand les gens ne connaissent que mon père.

Kamu ne répondit rien. Lucas et Loli ressemblaient beaucoup plus à François. C'était visible. Même s'ils avaient pris un peu des traits de leur mère, ce qui n'était pas un mal puisque cela adoucissait cet air sévère et guindé qui caractérisait leur père.

-Bon…

-Tu ferais bien d'y aller. J'arrive dans pas longtemps.

Il hocha la tête, et fit quelques pas vers la porte, avant de revenir à son sac de voyage. Il fouilla dedans et en tira deux boites.

-C'est les cadeaux de Noël pour Maxime et Ben.

-Juste pour eux ?

-Oui, chaque année, on tire au sort pour savoir à qui on va faire un cadeau. Cette année, y avait papa et connasse, Lucas et sa femme, Maxime et son pote, tonton et Daniella, et Loli. J'ai eu Maxime.

-Tu as pris quoi ?

-Des bracelets en cuir. Je manquais d'idée.

-Nils, tu es génial, ne put-elle s'empêcher de dire.

Il haussa les épaules.

-Je ne vois pas en quoi…

Il posa les cadeaux sur le bureau.

-Je les laisse-là, pour le moment.

Alors qu'il esquissait un pas vers la porte, Kamu le rappela.

-Attends ! Tu veux faire un truc pour moi ?

-Oui, bien sûr.

-Baisse la fermeture de ma robe.

A ses mots, son compagnon rougi. C'était pourtant lui qui l'avait remonté cette fermeture.

-Qu'est-ce que tu vas faire ?

Il parut retenir son souffle en posant cette question.

-Retirer la robe.

Sans plus attendre, elle lui tourna le dos et releva ses cheveux. D'une main hésitante, il fit glisser le morceau de métal, dévoila la peau pâle de Kamu. Arrivée au milieu du dos, il s'interrompit.

-Elle descend jusqu'à la taille, tu n'es pas encore au bout, lui expliqua la mage.

Elle n'obtint aucune réponse, et son compagnon ne bougea pas.

-Nils ?

-Hein ?

-Plus bas !

-Plus bas ?

-Oui, la fermeture se descend jusqu'à la taille.

Il passa la main sur sa taille et la plaqua contre son torse, alors qu'il déposait des baisers sur sa nuque. Ses doigts firent glisser le tissu, dévoilant ses épaules. Il ne put s'empêcher de déposer ses lèvres dessus, sa peau était si douce.

Kamu le laissa faire, tout en sentant son corps s'embrassait. Si jamais il continuait ainsi, elle ne répondait plus de rien. Encore plus parce qu'ils étaient seuls dans cette chambre et que personne ne viendrait les déranger.

-Nils ?

Il l'enlaça plus fort, alors qu'il continuait à caresser son cou de son souffle chaud.

-Si tu continues…

Elle n'obtient toujours aucune réponse.

Kamu n'y tint plus et se retourna vers son compagnon. Leurs regards se croisèrent, avant qu'elle se jette sur ses lèvres pour un baiser des plus passionnés. Il recula sous le choc, et la mage le poussa sur le lit. Nils se laissa faire et la contempla les yeux remplis de désir.

Sa compagne passa la main dans son dos et fit glisser la fermeture éclair, laissant tomber sa robe sur le sol. Elle abandonna aussi ses chaussures, avant de se jeter sur son ami, le recouvrant de son corps. Il l'agrippa et la plaqua contre lui, trouvant rapidement ses lèvres pour continuer à l'embrasser.

La mage glissa les mains sous sa chemise et commença à parcourir son torse, du bout des doigts. Il ne lui dit rien, les yeux fermés, il se laissait totalement aller. Cependant, il parut reprendre conscience lorsqu'elle commença à lui retirer le vêtement, et se redressa.

-Attends, Kamu !

-Oui ?

Elle s'arrêta pour le regardait, mais ses caresses ne cessèrent pas pour autant.

-Je…

Il prit ses mains dans les siennes.

-Mauvaise idée, souffla-t-il juste.

-Je ne te plaît pas ? Si c'est mon apparence, le problème, je peux…

Il secoua la tête, et la repoussa sur le côté, et s'assit sur le rebord du lit.

-Non, c'est moi qui… Il faut que je retourne en bas…

Visiblement, il n'avait plus la tête à ça. Kamu tenta d'accrochait son regard, mais il fixait désespérément le sol.

-J'ai fais quelque chose de mal ?

-Non, c'est seulement moi, qui suis con !

La mage posa tendrement sa main sur ses épaules.

-Nils, je ne comprends pas…

Il ne répondit pas. Alors, elle commença à le masser. Lui aussi paraissait particulièrement crispé. Pendant quelques instants, il se laissa faire, mais finit par se relever.

-Je suis désolé. Comme si tu avais besoin de ça…

-Besoin de quoi ?

Elle ne comprenait rien. Il était si étrange dans ses gestes, et ses façons de faire. Il ne répondit pas et ne se retourna pas vers elle.

-Je descends. A tout de suite.

-D'accord.

Il fila et franchit le seuil de la porte sans un regard pour elle.

Une fois seule, elle se recroquevilla dans le lit. En cet instant, Kamu paraissait minuscule perdue sur le matelas. Elle ferma les yeux. Avait-elle fait quelque chose de mal ? Il avait pourtant l'air d'en avoir envie. Après tout, c'était lui qui avait commencé…

Qu'est-ce que je suis censée faire…

Retrouver le pendentif enchanté.

Elle se prit à sourire en entendant Loth.

Tu étais là ?

Je n'empiétais pas sur ton intimité si c'est la question que tu me poses. Je me suis fermé quand il a commencé et je suis revenue quand il est parti.

Merci.

Elle ne voyait pas quoi dire d'autres. Loth n'appréciait pas certains de ses comportements. Il lui en faisait part, mais ne la gênait pas, et ne l'empêchait pas de faire ce qu'elle voulait. De plus, il était toujours là, pour elle. En cet instant, elle sentait sa chaleur et aurait presque pu croire qu'il l'enlaçait tendrement.

Alors ?

Alors quoi ?

Est-ce que vous…

Non.

Ca avait pourtant l'air bien parti…

Elle haussa les épaules.

Je ne comprends pas. Un instant, il veut et l'autre, il se sauve en courant…

Laisse-le mariner.

Comment ça ?

Sois indifférente.

Elle fit la grimace.

C'est pas simple…

Parce que tu es amoureuse de lui ?

On ne peut rien te cacher.

Depuis le temps, je te connais.

Mentalement, il la poussa gentiment. Kamu ne put s'empêcher de sourire. Heureusement qu'elle avait Loth avec elle, sinon…

Bon, qu'est-ce qu'on fait alors ? Et je ne te parle pas de Nils.

Elle comprit bien le message. Mais maintenant qu'elle était seule et qu'elle n'avait plus besoin de séduire qui se soit, la mage allait pouvoir montrer ses talents.

On se change, et on prend cinq minutes pour réfléchir.

Réfléchir à quoi ?

Trois choses occupent mon esprit : la magie et l'objet que l'on doit retrouver, la famille de Nils et…

Nils ?

Elle soupira, Loth la connaissait si bien.

Du coup, le pendentif ?

Elle approuva.

Mais avant, je vais m'habiller avant de prendre froid.

Pff, comme si cela pouvait être le cas...

Sans l'écoutait, elle se tourna vers sa valise et commença à fouiller dedans.


Texte publié par Nascana, 11 avril 2019 à 19h14
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