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tome 1, Chapitre 3 tome 1, Chapitre 3

Suite du "Bellagio", Las Vegas, Nevada,

31 Mai 2095 - 8:47pm.

Après quelques jours passés et une fois m'être imprégné des lieux, le temps se faisait alors de plus en plus long et l'absence de signe m'obsédait. Même ce loup géant qui fût pendant un moment comme une sorte de guide pour moi, était aux abonnés absents.

Aujourd'hui, les dernières gorgées de la énième bouteille cette semaine là enfin englouties, comme emporté par la rage, je l'envoyais alors se briser dans un coin de la pièce. Dans le fracas du verre brisant l'effroyable silence qui sévissait, plongeant mon regard dans les ténèbres du fond de cette suite à peine éclairée, je laissais alors doucement l'alcool et la solitude reprendre le dessus. Cela faisait déjà plus de soixante-douze heures que j'étais resté enfermé à boire et jouer aux cartes dans ce lieu qui manquait cruellement d'hygiène. Les volets clos en permanence ne laissaient passés qu'une infime quantité de fumée, et le reste du nuage quasi-permanent imprégnait très vite une odeur de tabac froid un peu partout dans la suite.

L'ennuie était tel que j'avais déjà effectué plusieurs rondes dans les étages pour réussir à stocker tout le bourbon disponible dans le bâtiment. Résultat des courses, j'avais de quoi tenir un siège. Plus de bouteilles qu'il n'en fallait pour saouler la totalité des survivants de notre époque, une bonne vingtaine de paquets de cartes, des milliers de jetons et mon stock de clopes plutôt conséquent avant ça se retrouvait fortement augmenté aussi. Durant mes fouilles, j'avais de surcroît trouvé un escalier menant aux sous-sols. En dessous du bâtiment se cachait un véritable trésor, un stand de tir avec un nombre impressionnant d'armes et de munitions. Stockées dans quatre immenses caisses en bois posées à même le sol dans le long d'un mur, elles semblaient n'attendre que moi.

Les armes étaient pour la plupart enraillées ou foutues, tout ça à cause des dernières tentatives de l'armée de créer des armes alimentées par batterie, n'utilisant alors plus de balles. À peine le premier prototype sortit d'usine, il paraît que l'armée avait directement lancé une production massive d'armes à énergie. Après ça, le reste des armes coûtant plus chère en entretien et en munitions sont devenus un peu plus rare. Mais malgré tout, les coups de feu qui résonnaient en tirant dans ce lieu clos étaient pour le moins désagréables et m'encourageaient à remonter loin de ce vacarme. J'aurais par ailleurs l'occasion d'essayer tout ça à l'air libre plus tard.

Remontant au quatrième, j'avais eu tout le temps de repenser à cette absence de signe qui m'obsédait. J'avais beau me penser fou, mais toutes ces histoires méritaient amplement des explications bien plus claires.

Après les très nombreuses lampées d'alcool ingurgitées dans la journée, je commençais à me sentir vaseux et tenir debout était de plus en plus difficile. Les interstices des volets me laissaient alors entrevoir la faible lueur violacée du crépuscule, appelant la nuit avec douceur. Cette voix résonnant dans ma tête comme un echo du passé, était à elle seule une véritable torture. Immaginez quelques instants entendre en permanence une personne chuchoter dans votre esprit, à l'image d'un moustique que volerait autour de vos oreilles sans arrêt, une horreur.

Avachis dans une banquette poussiéreuse, cela faisait déjà plusieurs dizaines de minutes que j'étais replongé dans un profond silence, cherchant déséspèrement comment m'occuper.

Une nouvelle fois, me défouler sur le toit du casino en envoyant des jetons briser les vitres des batiments adjacents me semblait être le choix le plus pertinent. J'avais besoin de m'exterioriser quelques peu et cette activité était la meilleure option pour le moment. Je me levais alors, titubant légèrement sur la gauche, puis sur la droite avant de me stabilisé de manière plutôt précaire, m'appuyant par la même occasion sur le buffet de bois que j'entendais craquer sous mon poids. J'attrapais rapidement une malette posée non loin de ma main, m'enloignant alors du divan ou j'avais eu l'impression de prendre racine au fil des heures.

L'étuie était fait dans un cuir noir noble, aussi sombre que mes yeux corbeaux, et ornementée de sangles en platine gravées d'un "B" pour Bellagio, mais elle était surtout remplie de jetons et c'était là tout ce qui m'importait. Je me dirigeais enfin vers le toit d'un pas titubant et moyennement assuré. Minable, rongé par l'angoisse et le souvenir de cette fillette semblant vouloir me rassurer en vain, je voyais l'idée d'entendre à nouveau cette voix familière s'éloigner de plus en plus de moi.

En y repensant chaques jours, je savais bien que cette voix me rappelait quelqu'un. Malheureusement, mes souvenirs étaient depuis trop longtemps enfouis pour que je puisse me rappeler clairement de quoi que ce soit.

Après avoir gravis les étages, m'étant engagé sur le toit depuis quelques secondes à peine, j'admirai déjà cette merveilleuse vue sur la ville. Le soleil s'éteingnait dans le ciel légérement eclipsé par une lune timide, dans un crépuscule violacé, parsemé d'étoiles. Cette vision qui ressemblait à s'y mépprendre à celle sur le toit du Venizia avant ma chute, commencait à emplir mon corps d'une sensation de flottement et reveillait alors ma blessure au thorax qui avait tranquillement diminué jusque là.

Quand soudain, une étreinte brûlante autour de moi se fit sentir. Elle se resserait et se précisait de plus en plus vers la cicatrice toujours gravée sur mon torse, qui s'illuminait brusquement d'un vert emmeraude éclatant, intensifiant par la même occasion la douleur. Dans l'incompréhension la plus totale, bientôt aveuglé par la lumière et la souffrance qui amplissaient, j'en lachais alors la malette qui tomba sur le sol, libérant ainsi la totalité des jetons qu'elle contenait, qui s'éparpillèrent un peu partout.

Très vite au sol à mon tour, la douleur était devenue insoutenable et mes poings frappaient encore et encore le béton bien trop solide pour se briser. Ce n'était pas cela qui allait m'arrêter, mais bientôt je sentais mon muscle pectoral sur le point de littéralement s'arracher. Consummé par la douleur, rampant vers le vide en déséspoir de cause, je ne voyais plus que ça pour mettre fin à cette torture. Ce n'est qu'une fois près du bord que l'intensité des pics dans mon thorax me replaqua violement au sol à nouveau, où je me tordais de douleur. Après quelques longues minutes de souffrance, des fourches dans le coeur et ma température en constante augmentation, je me retrouvais une fois de plus inconscient, gisant sur le sol.

Après un genre de sieste de quelques minutes due au contrecoup de tout ça, vaseux et vidé de mon énergie, j'essayais avec difficulté de mettre un genoux à terre pour m'aider à me relever. L'alcool n'aidant en rien à reprendre du poil de la bête dans ce cas figure, j'essayais malgré tout de faire abstraction des vertiges et de garder les idées claires. Quand en me relevant enfin, j'apperçu en tout premier lieu la présence d'une petite fillette, que je n'osai pas vraiment croire.

Malgré tout elle était là, recroquevillée sur elle même et en pleurs dans un coin prêt de la porte. Elle était très jeune, avait des cheveux chatains clairs plutôt courts et des yeux verts perçants dans la pénombre tel ceux d'un chat, rappelant à si mépprendre cette lueur qu'herbergeait mon torse tout à l'heure. Elle était couverte de ma veste, ridiculement grande pour elle, que j'avais laissé sur le toit plutôt dans la semaine, mais elle tremblait toujours comme une feuille tout en sanglotant.

C'était à la fois inquiétant et extrêmement réconfortant de voir quelqu'un à ce moment précis, même si ce n'était qu'une fillette d'à peine douze ans. Après tout ce temps, moi qui étais habitué à faire de longs monologues ennuyeux, j'étais complêtement décontenancé face à l'unique être qui soit venu à moi depuis toutes ces années. J'essayais alors tout de même de communiquer et de la rassurer.

- " Hey, euh... Petite ? Tu... Tu vas bien ?"

La fillette resta plongée dans le silence tandis qu'elle sanglotait toujours. Insistant avec peut-être trop d'entrain, je continuai tout de même.

- " Tu peux m'expliquer ce qu'il t'arrive ? Qu'est-ce-que tu fou là à chialer ?!"

Mon charisme antipathique semblait l'effrayer et elle avait l'air complétement perdue.

Prenant une longue respiration, je m'étais alors doucement détendu et je me decidais d'approcher d'un pas dans sa direction. Malheureusement, elle n'avait toujours pas l'air rassurée et quelques larmes coulaient encore sur ses joues par moment, je m'arrêtait donc pour lui demander calmement.

- " Ne t'inquiètes pas, ok ? Je ne vais pas te faire de mal... Tu me... Tu me comprends ?"

En guise de réponse, la fillette hocha timidement la tête de haut en bas.

- " Génial ! Alors ok, il faut que tu m'écoutes deux petites minutes. Calme-toi... Doucement... Voilà."

Elle prit alors quelques secondes de respiration, sûrement pour faire redescendre la pression accumulée jusque là par son tout petit corps aussi frêle était-il.

- " Ok, et tu serais capable de me dire d'où tu viens ?"

À ce moment précis la fillette respirait profondément pour la dernière fois et semblant réunir tout son courage, pointa du doig dans ma direction.

- " Euh, il va falloir être plus précise si tu veux qu'on s'en sorte..."

Puis, restant silencieuse, elle insistait alors jusqu'à ce que mon regard quitte la profondeur du sien encore baignée de larmes, pour s'abaisser vers le stygmate de mon torse toujours luisant d'un vert leger qui s'estompait de plus en plus au fil des secondes. Semblable à une larme verdoyante, coulant sur mon buste et brillant dans la pénombre qui avait commencée à s'abbatre sur le monde une fois l'eclipse disparue. Gravée sur ma peau, comme une piqûre de rappel à cette douleur qui avait alors totalement cessée de tambouriner dans ma poitrine. Mais que voulait bien vouloir dire la fillette ? Qu'est ce que tout cela signifiait ?

- " Donc tu viens de... De moi ? Ok... Mais qui es-tu ?"

Et c'est alors que dans l'incompréhension la plus totale, je la voyais à nouveau lever le bras, le doigts tendu vers moi.

- " Ok... Très bien... On va faire avec, hein."

M'étant habitué à des faits bien plus étonnants comme par exemple mon immortalité ou mes visions, cette nouvelle-ci n'arrivait que partiellement à m'étonner. Puis, quelques points paraissaient alors s'être un peu plus éclaircis. La fillette n'avait rien d'une hallucination et tout cela semblait changer pas mal de choses. Quelques unes de mes questions avaient trouvées des réponses innatendue mais il en restait beaucoup d'autres irrésolues, qui le resteraient d'ailleurs tant que la fillette n'eût pas l'air douée de parole.

Était-ce elle la silhouette frêle de ma vision ? Qui était-elle vraiment ? Et que faisait-elle ici ?

Les traits de son visage aussi angélique qu'innocent me laissait traits pour traits penser à quelqu'un enfouie dans mon passé, mais malgré mes efforts, rien ne me venait. J'étais quelque peu décontenancer par la situation, quoi que comme guidé par un espoir nouveau.

L'innocence de ses traits, la frayeur dans ses magnifiques yeux couleur émeraude... Tout chez elle m'était familier, jusqu'aux larmes sur ses joues frippones qui reflétaient la lumière de la lune.

- " Mais qui tu peux bien me rappeler comme ça... ?"

C'était une question qui n'attendait pas réellement de réponse d ela part de la fillette pour une fois, mais j'avais étrangement ressenti le besoin de l'exprimer oralement. La fillette semblait légérement s'interroger, ne comprenant sûrement pas la question. Quand soudain, une migraine comme des coups de marteau dans le crane m'incapacitait quelques instant. Le temps d'une vision plutôt net, je revoyais alors la fillette.

Cette fois-ci, elle était en train de se précipiter dans une maison à la merci d'un incendie. Ne voyant pas la fillette ressortir de la batisse en feu, je me surprenais alors à me jeter à mon tour dans les flammes pour la secourir, risquant ainsi ma propre vie pour sauver celle d'une inconnue. Malgré l'épaisse fumée opaque qui envahissait les pièces, j'evoluais jusqu'à trouvée la fillette étendue, suffoquant au près de son chien qu'elle venait certainement sauver. Je ne pu alors m'empêcher de sauver ces deux êtres au coeur pure.

La peur au ventre, la fillette avait laissé beaucoup de fumée s'infiltrer dans ses poumons et elle était comme paralysée au sol. La petite sur le dos et le chien sous le bras je m'empressais alors de rejoindre la sortie et il ne m'avait pas fallu longtemps pour sortir l'atteindre. Une fois à l'extérieur de la maison qui se transformait en un immense brasier au milieu d'une avenue typiquement américaine, je n'avais pa pu m'empêcher de plonger mon regard dans le sien pour vérifier son état de conscience avant même l'arrivée des secours. Ces larmes brillaient à la lueur rougeâtre des flammes en arrière plan. Ses yeux vert perçants et cette pureté d'âme. Il n'y avait aucun doute. C'était-elle ! Mais, pourquoi ?

Après quelques minutes d'abscence, mes yeux commencèrent à se rouvrir doucement. Quelqu'un ou quelque chose me tapait sur le bras. J'étais étendu là sur le sol, à moitié couché dans les jetons du casino. La position était très inconfortable et peu flatteuse. La fillette se tenait alors à moins d'un mètre de moi et elle tentait de me réveiller en donnatn de petits coups saccadés sur mon épaules, avec un petit bâton très certainement déposé sur le toît par une bourrsaquede vent plus tôt dans la journée. Elle avait l'air d'être restée là depuis ma perte de conscience, à s'inquiéter, mais elle avait aussi prit le temps de se calmer et de secher ses larmes.

J'esquissais alors un sourire avant de retenter de communiquer avec douceur.

- " Et bah dis donc. T'es pas un petite fille banale toi... Allez viens, on va se mettre au chaud. "

Elle aquiesça en remuant là tête comme pour dire oui. D'abord surpris, je me relevais alors et prenais la main qu'elle me tendait en signe de confiance,pour la guider au chaud, dans la suite où j'avais élu domicile.

Malheureusement, je n'avais pas pour habitude de recevoir du monde ici et l'état de la piaule était déplorable. J'entreprenais donc à cette occasion un rapide brin de ménage, tout en aillant pris soin d'installer la fillette dans un fauteuil poser dans un coin de la salle avec un paquet de bonbons trouvé sur place pour caler une éventuelle dent creuse.

C'est seulement en commençant à ramasser les bouts de verre dans un coin de la pièce qu'un fait me sauta aux yeux.

- " Mais j'y pense, il va falloir te trouver un nom..."

La petite me regardait alors dans un long silence quand je lui proposa.

- " Qu'est-ce-que tu penses de Lucy ?"

Cette fois-ci, le hochement de tête était négatifet la grimace sur son visage semblait indiquer que cela ne lui plaisait pas vraiment. Je cherchai donc autre chose.

- " Ok. Bon, on va en trouver un autre. Mhm..."

- " Quelque chose de frais, d'estival ! Mhm..."

- " Et que penses-tu de Juna ? Hein ? Après tout, il est sûrement minuit passé, on doit-être le premier juin. Puis, je trouve que ça te va plutôt bien !"

Après quelques secondes d'hésitation la fillette entrouvrait alors légèrement les lèvres pour prononcer son premier mot.

- " Ju.. Ju-na..."

La fillette relevait ensuite la tête, regarda dans ma direction et me sourit pour la première fois, à cet instant précis, comme pour confirmer sa décision. Une fois cet échange terminé, j'avais presque la certitude d'avoir gagné sa confiance, ce qui était déjà pour moi un énorme pas en avant. Je n'étais plus seul.


Texte publié par MK, 20 avril 2018 à 17h06
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