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Altitude des Songes Tome 1-La voie de l'espoir
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tome 1, Chapitre 3 « 3-LE VIEUX PALEFRENNIER (Halkens) » tome 1, Chapitre 3

Les dernières lueurs du jour éclairaient la crête du dernier vallon que nous venions de dépasser. Nous descendions une cuvette qui remontait un peu plus loin sur une haute colline qui dominait tous les alentours. Une forteresse était accrochée à la hauteur, munie d’une simple enceinte entourée de cinq échauguettes. Le bastion possédait un mur principal très haut percé de meurtrières de toute part, surmontait par deux grandes tours. Toute la ville s'était développée par des cercles concentriques autour de la place forte. Nous nous dirigions par la route du sud au grand galop vers l'auberge de l'Ours Furieux. J'avais étudié beaucoup de rapport, cet établissement était modeste, son côté pratique avait attiré mon attention. Elle était située au carrefour des deux grandes routes qui reliaient les Océans du Nord et du Sud, le golf de Loresund à l’Ouest et le golf de Visalitin à l’Est.

Lors d'un repas informel avec mon père et ma mère j'avais appris que les royaumes voisins augmentaient les taxes sur les échanges commerciaux pour nous appauvrir. L’objectif du roi Raijin était de nous obliger à terme de nous rallier à cette nouvelle fédération. Nos espions pensaient qu’il s'agissait d'un plan à long terme d'invasion du royaume Lanthia.

Je ne comprenais pas qu’elle serait le bénéfice de cette invasion. Le roi Raijin était impitoyable mais loin d’être fou. Les Lanthians devaient détenir un secret ou une richesse qu’il convoitait. Si on acceptait cet élément, il était logique de ne pas ouvrir un conflit avec le peuple Lanthian sans avoir au préalable neutralisé l’ennemi potentiel dans leur dos. Notre frontière était lourdement défendue à tous les cols praticables de la chaine d’Irtaya sur près de deux cent cinquante kilomètres de long.

Un long siège ralentirait à coup sûr leur invasion du royaume de Lanthia, leur tactique était de gagner économiquement cette alliance. D'après mon père nous ne pourrions résister longtemps ni à un assaut ni à une guerre commerciale. Les royaumes du centre avaient considérablement augmenté les rangs de leur armée. Je lui avais rappelé l'engagement du Chevalier Protège envers notre peuple. L’absence de nouvelle des Lanthians avait érodé la confiance de nos dirigeants en cette promesse. Ils s'étaient retranché derrière leur frontière mais au contraire de mon père le roi, je croyais à sa parole.

Je me souvenais du Chevalier comme si c’était hier, elle avait beaucoup occupé mes pensées. Elle était de taille moyenne, très jeune, une chevelure blonde attachée en une simple natte, son regard vert clair était rempli d'une extrême gentillesse et d'une douceur des plus agréables. Elle était restée seulement douze jours, je me souvenais aussi des séances d'entraînement avec les plus fines lames du château. Sans aucune once d'agressivité, elle avait défait tout le monde aux sabres, en remportant au mépris de la logique, les combats aux glaives et aux boucliers. Elle était de carrure frêle ce qui paraissait très handicapant pour bloquer les coups puissant des boucliers, mais elle était incroyablement rapide et son sens de l’anticipation était inimaginable. Elle remportait tous les combats. A l’arc elle confirma la réputation de son peuple dans la suprématie de cet art

Au cours de ses douze jours, elle passa la majeure partie de son temps avec moi. J’avais même assisté à des parties de Jeu des rois et de jeu Go avec le vieux roi qui durait une bonne partie de la nuit. Ces affrontements tactiques avaient décidé notre souverain de lui donner sa confiance.

J'avais beaucoup poussé mes études en stratégie pour compenser ma faiblesse dans la magie de notre peuple, j’avais essayé de convaincre le roi que j'étais la personne idéale pour cette mission. J’étais un pion sacrifiable, car je ne monterais jamais sur le trône, ma clairvoyance sur ma propre place au sein de notre peuple avait décidé mon père à accepter.

Nous avions un système de succession particulier, le Roi devait appartenir à la famille Hassor, quelle que soit sa proximité de la branche principale. À la mort du vieux Souverain, mon père lui avait succédé, il y a douze ans de cela. Lors de mes entraînements au monastère du vent, j'avais affronté beaucoup de membres de la famille et au moins six d'entre eux me surpassaient. Mais cela n'était pas grave, nous n'étions pas tous fait pour gouverner, je voulais être utile à mon peuple et mettre mes capacités à son service.

Dans la poussière et la nuit, nous contournions l'auberge de l'Ours Furieux pour accéder aux écuries de l'établissement, je mis pieds à terre saisissant la bride de mon cheval et celle de la monture d'Halkens.

- Maitre, je vais mener et installer nos montures aux écuries, dis-je.

- Bien Ogur quand vous en aurez fini ici, montez les affaires dans ma chambre.

- À vos ordres, maître.

Halkens descendit de sa monture et se dirigea vers l'intérieur de l'établissement. Je me dirigeai vers l'entrée des écuries. Un vieil homme brossait un grand cheval de bataille taillé pour porter un homme lourdement armé ou pour tirer un char.

- C'est une très belle bête, n'est-ce pas ? Me demanda le vieil homme.

- Oui, c'est évident. Est-ce vous qui êtes en charge des lieux ?

- Vous pouvez mettre vos deux chevaux Vituri dans les deux box à côté de la fontaine là-bas.

J’y menai et attachai nos deux montures Vituri, cette race était endémique à notre royaume. Ce vieil homme avait identifié d'un seul coup d'œil leur origine. Je prenais le temps de leur ôter leurs selles, de mettre du fourrage frais dans leurs box et de remplir leurs abreuvoirs.

Je regardai les autres emplacements du coin de l'œil qui étaient remplis de montures aux tailles, couleurs, tâches et musculature très différentes des nôtres. L'histoire que je préparai, tiendrait la route tant qu'Aksel et Gavin ne venaient pas à l'auberge de l'Ours Furieux avec leurs montures. Je devais m'éclipser discrètement et les interceptais sur la route du Sud.

- Vous venez des iles du nord n'est-ce pas ? Je ne vois pas le tatouage de votre clan.

- Vous posez beaucoup de questions vieil homme, dis-je sur un ton menaçant.

D'un geste lent je repoussai ma cape et posais ma main droite sur le pommeau de mon glaive et plongeai le regard le plus noir que je possédais sur le vieil homme.

- Pardonnez-moi, je suis un homme trop curieux, pas un guerrier juste un vieux palefrenier.

Il était trop cultivé pour être un simple palefrenier, je quittais les étables calmement en rabattant la capuche de ma cape sur la tête. Je partais dans l'obscurité naissante, au bout de quelques minutes de marche, toutes les lumières de la ville avaient disparu de mon champ de vision. J'étais d'ordinaire un très bon pisteur mais ce soir j'étais le gibier, trois hommes me suivaient.

Ma soudaine fuite avait dû conforter les doutes du vieil espion. Ils se rapprochaient discrètement, mais leurs pas étaient lourds. Je supposais qu’ils étaient munis d’une armure et d’un bouclier, j’augmentai l’allure pour maintenir la distance. Pas trop vite pour ne pas qu'ils s'aperçoivent que je les avais repéré. Leur but était clair dans mon esprit, je ne pouvais me laisser capturer.

Lentement, je faisais glisser l'arc court que j'avais dissimulé sous ma cape et encochais une flèche. Je ne pouvais compter sur l'aide d’Aksel et Gavin pour me débarrasser de mes poursuivants, je leur avais demandé de faire une longue halte afin de mettre de la distance entre nous. Cela m'avait semblé être une bonne idée au départ, je n’avais pas anticipé que nos montures pourraient trahir nos identités. Pendant que je montai une légère pente, j’échafaudais mon plan, je prévoyais au sommet de la hauteur de disparaître de leur champ de vision. Je ralentissais ma foulée pour mieux écouter le bruit de leurs pas.

Ils se rapprochaient, ils avaient sans aucun doute possible hâte d'écourter cette promenade nocturne. Dès que je fus persuadé de ne plus être visible du bas du vallon, je partis au pas de course vers l'arbre qui se trouvait sur ma droite. Je m'y cachai derrière juste avant de voir apparaître deux grands gaillards l'arme au clair. Ils me cherchaient du regard dans tous les sens sans bouger, le vieil espion apparut à son tour.

Quand ils se tournèrent pour recevoir les nouveaux ordres, je lâchai ma première flèche qui transperçait le soldat de droite en plein cœur. Il commença à peine sa chute que le deuxième homme me chargea bouclier en avant. Je visais et lâchais ma deuxième flèche sur le vieil homme, je ne pris pas le temps de regarder si ma flèche avait atteint sa cible que je jetai mon arc court à la figure du soldat. Il le repoussa d'un de bouclier sans marquer la moindre pause dans sa course.

Je dégainais mon arme juste à temps pour parer son premier coup d'épée, il était massif et rapide. Je manquai d'allonge avec le glaive et Il le savait parfaitement. Il se contentait de gagner du temps, son Maitre devait me contourner pendant que nous faisions s'entrechoquer nos lames. Je rentrai dans la danse et accélérais la vitesse de mon bras tout en concentrant mon énergie dans ma main droite. Je projetai soudainement mon l'onde céleste au moment où mon adversaire leva son arme, mon vent lui trancha le bras droit juste au-dessous du coude. Il lâcha aussitôt son bouclier pour compresser avec sa main gauche sa blessure qui laissait s'échapper une grande quantité du sang, il était hors de combat. Il me restait un adversaire à neutraliser, je me doutais qu'il ne tenterait pas de m'affronter de face, je feignais de rester figé devant la mare de sang lorsque je sentis une présence approchée dans mos dos. Je le laissai s'approcher jusqu'au dernier moment, je découvris le vieux renard une dague à la main.

Dans une volte-face rapide, je saisissais son poignet droit avec ma main gaucheen le tournant violemment vers le haut faisant sauter la dague de sa main, je plaçais aussitôt la mienne sous sa gorge, Il était essoufflé. Je ressentais la perte d'énergie que m'avait coutée ma puissante attaque, je lui décochai brutalement un crochet gauche au foie suivi d'un coup d'épaule qui finit de le mettre à terre. C'était un espion doublé d'un assassin, je ne pouvais courir le risque de rester aussi proche de lui.

Une deuxième vague d'épuisement me toucha et me fit trembler les jambes. J’avais lancé l'onde céleste pour la première fois sur un être vivant, par manque de maîtrise, j'avais utilisé plus d'énergie que nécessaire. Je rassemblai mes forces pour garder l'illusion du contrôle et ramassais sa dague par la poignée. Je la plaçais sous mon nez pour en sentir le produit qu'il l'avait applique dessus.

- De l'ourari (4) de bonne qualité j'ai l'impression. Je pourrais la tester sur toi pour en mesurer son efficacité. Qu’en penses-tu ?

Au premier pas son visage se décomposa. Je sus que j'avais visé juste.

- Quel est ton nom ? Demandais-je avec plus d’autorité.

Son regard se porta sur le soldat à terre derrière moi, son bras était coupé, mais il était encore conscient.Il s'accrochait fermement à la vie, le sang suintait par sa main qui faisait pression sur sa blessure.

- À plat ventre et mets les mains dans le dos. Ordonnais-je au vieil homme

Il s'exécuta lentement. Une fois qu'il fut en place, je lui plantais les deux genoux dans le dos. Sans ménagement je les saisissais et les attachais avec un triple nœud de chaise, j'attachai ses mains à ses jambes pour l'immobiliser au sol. Je rengainai mon glaive et me dirigeais vers le soldat.

- Si je te pose un garrot, cela t'empêchera de te vider de ton sang.

Il me regarda d'un air perplexe, je posai un genou à terre en découpant avec ma dague un morceau de sa tunique que j'enroulais vigoureusement sur le muscle pour comprimer l'artère.

- Tu as tué mon ami. Pourquoi m'aides-tu étranger ?

J'avais la nausée de voir son bras tranché d’aussi près, je rassemblai mes esprits pour éviter que mon estomac ne communique avec ma bouche le dégoût de moi-même qui s’était emparé de moi. Je finis de serrer le garrot en silence.

- Ne bouge pas, je vais allumer un feu pour cautériser ta blessure, dis-je.

Je n'avais pas besoin de l'attacher, il avait perdu trop de sang pour s'enfuir. Il était désormais très faible. Je ramassais rapidement des brindilles de bois et allumais un feu, je ramassais son épée encore serrée par sa main et la posais au-dessus des flammes naissantes. Je continuais ma collecte de bois pour attiser la chaleur du foyer. Le temps que la lame chaufferait au rouge, je décidais de reprendre l'interrogatoire de l'assassin.

- Quel est ton nom ?

- Si je te le dis, mon maitre me tuera après m'avoir longuement torturé.

- De toute façon ta vie ne tient qu'à un cheveu, dis-je en agitant ma lame.

- Tu ne me tueras pas, je le sais, me rétorqua-t-il.

Il regardait le soldat que je venais de soigner. Je n'avais pas besoin de connaître son nom et je n'avais aucun moyen de le retenir assez longtemps pour nous permettre de mettre assez de distances avec nos poursuivants. Si je les attachai loin de la route, le soldat mourrait à coup sûr de sa blessure même si je la cautérisai et le vieil assassin mourrait de faim. Je me levai en dégainant mon glaive

- De toute façon je n'ai pas le choix,.donne-moi ton nom que je sache qui je tue.

- Tu comptes le tuer ou le soigner. Je ne vous comprends pas, membre de la famille Hassor, rajouta-t-il.

Il avait deviné mon nom. Il en savait beaucoup trop. Il n'avait pas entièrement tort, je n'avais pas envie de les tuer, mais le sort de mon peuple était en jeu. Je ne pouvais le laisser s'interposer dans ma mission. Je resserrais la prise de mon glaive.

- Une fois que j'aurais cautérisé sa blessure, il perdra connaissance. La fièvre qui s'ensuivra me permettra de partir loin d'ici sans avoir à le tuer. Je marquais une légère pause en ramenant mon regard sur lui avant de lever mon glaive au-dessus de sa tête.

- Je n'ai pas besoin de savoir ton nom. As-tu quelque chose à dire avant de mourir ?

Au moment où il s'apprêta à répondre un cri strident et puissant se rapprocha de moi à une vitesse effrayante. Je reculai de quelques pas le regard fixé sur le ciel pour trouver l'origine de ce son. Un aigle gigantesque surgi dans mon champ de vision. Il se posa entre l'assassin et moi dans de grands et puissants mouvements d'ailes. D'une rotation lente de sa tête, il planta son regard de grand prédateur sur moi. Au lieu de deux grands yeux jaunes avec un grand iris noir au milieu, Ces pupilles étaient rouges parcourus d'une couronne noire constellée de trois cercles noirs et blancs. À l'intérieur de la couronne se trouvait un quatrième cercle noir et blanc. Ce que J'avais pris pour de simples cercles étaient en fait des iris supplémentaires, ils s'ouvraient et se refermaient au rythme de sa respiration. Au bout de quelques secondes ses huit Iris cessèrent d'osciller.

Cette rencontre était déroutante, l'aigle se tourne vers le vieil homme et se dirigea lentement vers lui. Je n'avais jamais vu un aigle de cette taille ni aucun de ses congénères plus petit d'aussi prêt. Son territoire était habituellement dans les montagnes à chasser les rongeurs, je ne comprenais pas les raisons de son irruption si loin de chez lui. Ses frères n'aiment pas la proximité de l'homme. Je sentis une décharge d'énergie émanant du grand rapace qui me fit reculer. En rassemblant mes esprits, je remarquai que mon prisonnier gisait inerte sur le sol. Je contournais le grand prédateur et posais ma main sur la gorge du vieil homme, je sentais encore son pouls, il était faible mais son cœur battait. Je me tournai vers mon invité surprise.

Quand je croisai son regard, je sentis qu’il voulait me faire comprendre quelque chose. . J’étais abasourdi. J’étais sûr qu’il ne m’avait pas parlé. Lentement il déplia ses grandes ailes qu’il battit majestueusement pour reprendre de l'altitude. Il disparut dans l'obscurité. Je restai un long moment sans savoir quoi faire. Je décidai de tirer le vieil homme près du feu.

Je regardai ses yeux qui ne réagissaient pas à la lumière, mais qui bougeaient frénétiquement dans tous les sens. Il semblait être prisonnier d'un rêve intense. Je prenais la décision de le laisser en vie sur la route. Je m'occupais de cautériser le bras du soldat qui avait perdu connaissance pendant l'apparition du grand rapace.

Quand Aksel et Gavin me rejoignirent, nous enterrions le soldat que j'avais tué, je mis en terre mes questions et mes regrets avec lui, il était le premier homme à qui j'ôtai la vie. Sans aucune sommation, je lui avais fiché une flèche en plein cœur. La mort avait été instantanée, ni la peur ni la douleur n’avaient eu le temps de se graver sur son visage. Désormais je connaissais le poids de la mort. Aksel transporta le vieil homme quelque lieu plus au sud pendant que nous remmenions le blesse à la ville. Il avait déjà beaucoup de fièvre. Nous le déposions discrètement dans la première étable que nous croisions.

- Laisse-moi ta monture. Tu vas aller rejoindre Halkens à l'auberge de l’Ours Furieux. Discrètement, tu lui diras que demain à la première heure il lui faudra vendre nos deux montures. Nos chevaux Vituri peuvent attirer trop l’attention. Manges et reposes-toi bien, nous vous attendrons avec Aksel demain soir au village d'Entrak.

- À vos ordres.

Sans poser de questions il tourna les talons et partit rejoindre Halkens qui devait m'attendre à l'auberge.


Texte publié par Lâhm, 15 avril 2018 à 08h16
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